Les Zapartistes

Critique : Les Zapartistes présentent Zap 2011 à Montréal

Mardi 27 décembre 2011 – Métropolis (Montréal)

Les Zapartistes présentaient, hier soir au Métropolis, le premier de 4 cabarets Zap 2011, revue de l’année sous forme d’humour politique caustique, devenue grand-messe pour les petits et grands indignés. Cette dose annuelle de sketchs véhéments et de gags narquois ne perd visiblement pas de son mordant, même en revisitant une année où l’espoir se laissait finalement poindre.

D’abord, réglons une question qui s’imposait avec les récentes nouvelles entourant le groupe: oui, les Zapartistes peuvent survivre à une pause de François Parenteau, sans que le spectateur en perde trop au change.

Pour ce faire, le « vieux stock des Zapartistes » Christian Vanasse et François Patenaude (et la Zapartiste de l’ombre, Nadine Vincent) se sont judicieusement tournés vers les « LNIstes » Vincent Bolduc et Jean-François Nadeau, en plus de faire appel une fois de plus à Brigitte Poupart.

Les petits nouveaux n’ont pas trop mis de temps à s’adapter au rythme et au ton des Zaps. Ils rehaussent même l’aspect « jeu » du spectacle, si bien que la revue de l’année des Zapartistes n’a jamais semblé aussi orientée vers les sketchs que cette année, ce qui n’est pas une mauvaise chose.

 

Du sang neuf

Nadeau s’avère une découverte formidable. C’est à lui que l’on a confié les imitations de Jean Charest (qui insiste, tel une mule frisée, avec son Plan Nord) et Stephen Harper (« Darth-Vaderisé »). Peut-être pas à la hauteur des légendaires parodies de Parenteau, mais tout de même très réussies.

Ses occasions de briller sont nombreuses et il n’en rate pas une. La recrue incarne notamment un Lucien Bouchard fidèle à sa lucide personne, dans un sketch où l’on fait appel à lui pour relever l’image de l’industrie de l’exploitation des gaz de schiste, rebaptisée « valorisation du jus de roche » par un André Boisclair (Vanasse) enthousiaste.

« N’ayons pas peur de prendre des risques. Forons, mes amis! Forons, pas de capote! », lance Nadeau avec l’entrain convenu du personnage.

C’est également à lui que l’on doit les désopilantes imitations de Gilles Vigneault rendant hommage à Jack Layton, Raoul Duguay avec son hymne au Québec et le journaliste de TVA Richard Latendresse qui s’aventure avec intrépidité dans la jungle urbaine des primitifs indignés de Montréal.

Vincent Bolduc s’intègre aussi admirablement. On retiendra notamment son imitation plutôt juste de Régis Labeaume et son interprétation un peu fausse mais bien sentie des Monarchistes, sur l’air des Anarchistes de Ferré.

Pour le reste, la formule est éprouvée et l’actualité annuelle suffit à rafraîchir la matière. La troupe passe au peigne fin les nouvelles politiques (et parfois culturelles) tant locales qu’internationales – Poupart livre toujours une Joyce Napier désopilante et une Pauline Marois savoureusement pathétique – écorche au passage notre obsession nationale pour le hockey (Vanasse prend un plaisir fou à incarner Ron Fournier) qui nous distrait des vraies choses, secoue la mollesse des Québécois passifs (excellent sketch de Patenaude et Nadeau, interprétant deux ados blasés formant un parti politique indépendantiste mou) et taquine (presque) autant la gauche pour la forme que la droite pour le fond. Comme quoi l’insolence peut être ambidextre.

L’écriture des Zapartistes est une fois de plus une grande force. Pendant près de 3 heures (avec entracte) sans longueurs, on nous bombarde de gags, de répliques, d’habiles calembours et de références avisées mais aussi de perles qui laissent songeur. « Sans satiété, il n’y aurait pas de société », réfléchit tout haut, par exemple, l’un des personnages de Vanasse au sujet de l’exploitation inextricable des grosses tuques de « l’économie 2.0 ».

Avec le tact et l’expérience derrière la plume des Zapartistes, tant d’appels à la révolte, à l’indépendance et à la prise de conscience ne basculent jamais dans un ton moralisateur, puisque l’hilarité règne au-dessus de tout ça.

Comme quoi rire n’est pas qu’une pas qu’une « si jolie façon de montrer les dents », mais aussi une manière efficace de passer de la lassitude à l’engagement, tout en passant une belle soirée. Souhaitons-le nous pour 2012.

* Zap 2011 se poursuit jusqu’au 30 décembre au Métropolis. Les Zapartistes présenteront ensuite leur revue de l’année:

– au Théâtre du Cégep de Trois-Rivières, le vendredi 6 janvier 2012
– à la Salle Odyssée de la Maison de la culture de Gatineau, le samedi 7 janvier 2012
– au Capitole de Québec, le jeudi 12 janvier 2012
– à la Salle Maurice O’Bready de Sherbrooke, le vendredi 13 janvier 2012
– au Théâtre du Vieux-Terrebonne, le samedi 14 janvier 2012

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