Critique | Foxygen au Il Motore de Montréal

C’était le bordel mercredi soir au Il Motore. (Oui, plus qu’à l’habitude). Foxygen était en ville et s’est adonné à une pétarade sans queue ni tête, plus déconnectée que savoureusement rock’n’roll.

Photo par Patrick Roger.

Photo par Patrick Roger.

Il faisait chaud dans la baraque. La petite salle du Mile-Ex affichait complet et on pouvait ressentir tout l’enthousiasme des fans réunis, une foule curieuse d’entendre les versions live de l’excellent We Are The 21st Century Ambassadors of Peace and Magic, malgré l’étrange réputation qui précède le groupe. Déjà, dans sa courte histoire, il n’est pas rare que la bande (ou certains de ses membres) ait pété les plombs…

En gros, le chanteur Sam France est une bête sauvage imprévisible et catapultée dans une autre dimension par un quelconque mélange de stupéfiants.

Soyons francs : généralement, ce genre de cocktail malsain donne lieu à une expérience rock’n’roll unique, viscérale, et c’est sûrement ce qui survient parfois avec Foxygen sur scène. Mais mercredi soir, c’était un véritable capharnaüm, tant sonore que visuel.

En partant, aucun groupe n’est bien servi par la sono du Il Motore. À moins que le bruit d’un chaton dans un malaxeur vous semble harmonieux.

Ce n’est pas si mal, au fond, pour Foxygen, qui semble prendre un malin plaisir à foutre le feu à ses excellentes chansons rock un peu hippie. Sur disque, c’est entraînant, mélodique, souvent joli. Nuancé et équilibré, surtout.

Sur scène, c’est foutrement plus sauvage, lo fi et tonitruant. Maniacodépressif au niveau des décibels.

Photo par Patrick Roger.

Photo par Patrick Roger.

La tempête sonore a débuté avec une chanson sur Jésus (on cherche toujours le titre) et une version méconnaissable de On Blue Mountain. Visiblement surexcité, Sam France se lançait partout, comme s’il cherchait à se départir d’un démon intérieur. Vous avez dit tourmenté ?

Lorsque la situation le commande, Foxygen sait tout de même faire preuve d’un peu de retenue et de concentration, ce qui fait bien paraître les titres plus mélodiques, comme la Beatlesque In the Darkness, ou la jolie Shuggie.  Pour cette dernière, les refrains avaient l’effet d’une grenade dans un salon de thé, mais au moins, la ligne directrice de la chanson s’y trouvait.

L’instrumentation est explosive mais trop brouillonne pour atteindre la cible. Au chant, France est tout simplement à côté de la track. Il faut vraiment connaître les chansons à fond pour saisir ses lignes mélodiques et des bribes de ses textes, passant du cri au marmonnement de façon totalement injustifiée, au gré de ses humeurs visiblement erratiques.

Des titres comme Make It Known et la chanson titre du nouvel album ont manifestement écopé de cette approche bâclée. En fin de prestation, une bataille a même failli prendre entre le claviériste et le chanteur. Les cinq membres ont quitté la scène dans un tohu-bohu qui semble avoir laissé tout le monde pantois.

À l’image de l’ensemble de la prestation, les membres sont revenus sur scène pour un rappel alors que la moitié de la salle s’était vidée et que l’autre moitié croyait qu’une chanson supplémentaire n’allait jamais arriver. Longue chanson constituée de plusieurs segments disparates, Teenage Alien Blues a aussi connu ses hauts et ses bas. Rien pour rattraper une performance décousue.

Visiblement, les membres de Foxygen brûlent la chandelle par les deux bouts et leur talent en prend pour son rhume.  Dans cette optique, difficile de dire ce que l’avenir réserve à ce jeune groupe pourtant si talentueux, mais il y a raison de craindre qu’il ne soit, au final, qu’une étoile filante dans le ciel chargé du rock indé.

foxygen-montreal-il-motore-01

 

Vos commentaires