Critique album | Lady Gaga – ARTPOP
Après des mois de spéculations, de performances ici et là, de nouveaux extraits, de photos aux concepts aussi différents que décousus les uns des autres, Lady Gaga a enfin livré son plus récent opus, ARTPOP. Celle qui a révolutionné le monde de la pop à l’aube des années 2010 est-elle toujours la reine? Hélas non.
Et le choc de l’esthétisme douteux et éclectique de la pochette passé, ça ne s’améliore pas vraiment dans les oreilles. Le tout forme un genre de ramassis d’idées, de concepts, qui auraient pu être intéressants s’il y avait eu un quelconque lien à faire entre eux. Un petit chaos à l’image de la pochette, en fait. Il y a au moins ça de cohérent.
À la première écoute, ARTPOP est plus malaisant qu’autre chose. Déjà que les textes de Gaga ont rarement été empreints d’une profondeur marquée, elle se surpasse désormais dans la futilité et le manque de subtilité. Elle ne se cache plus derrière des métaphores à la « disco stick » pour étaler ses réelles préoccupations majoritairement (en fait presqu’uniquement) amoureuses et/ou sexuelles. Elle manque de classe et surtout de maturité. Pas qu’elle en ait déjà eu, mais disons qu’on a souvent l’impression d’écouter les récits d’une danseuse nue.
Tomber dans la facilité
À cet effet, le début de l’album est particulièrement pénible. Mis à part la première pièce, Aura, qui possède un son particulier et pas inintéressant, les Venus (qui contient un facile et insignifiant jeu de mot avec la planète Uranus… on vous laisse imaginer), G.U.Y. (un acronyme pour Girl Under You), Sexxx Dreams et plus tard Swine seraient suffisantes pour cesser l’écoute de l’album à ce moment.
Disons que les pièces de ARTPOP sont loin d’atteindre la grandiloquence de certaines pièces du Fame Monster, avec les Bad Romance, Alejandro ou même Speechless. Et c’est ce qui est déçevant. Parce qu’on a beau dire tout ce qu’on veut sur Gaga, son talent est indéniable quand elle s’y met. Elle comprend la musique, l’écrit avec facilité et lorsqu’elle se donne en simplicité, piano-voix, on se demande bien où elle cachait son talent tout ce temps. On a qu’à se souvenir des reprises de ses propres succès (genre Pokerface) à la sauce jazz pour le constater.
Alors pourquoi s’entêter constamment à tomber dans de la grosse pop dance artificielle qui manque d’originalité ? Les artifices et les costumes extravagants ne suffisent plus à attirer l’attention. On y est habitué. Il faut surprendre autrement et alors que l’intérêt s’essoufflait avec Born This Way, Gaga échoue lamentablement à se réapproprier l’attention avec ARTPOP.
Il y a donc un aspect frustrant à l’écoute de cet album où l’on se dit que Gaga gaspille son talent à perdre son temps avec un son ultra générique, artificiel et sans âme.
Le truc en fait, c’est qu’elle joue à la limite du pastiche et du travail sérieux. Donatella en est un bon exemple, où la chanteuse dresse un portrait caricatural presque humoristique de la designer de Versace. On ne sait plus trop s’il s’agit d’un hommage boiteux ou d’une moquerie, mais le résultat n’en demeure pas moins amusant.
Bien sûr, on retrouve quelques bons coups sur cet opus de 15 chansons. Entre autres, Gypsy est accrocheuse et s’impose probablement comme la You and I (de Born This Way) de l’album avec son influence évidente à la Bruce Springsteen. MANiCURE est aussi entraînante, et rappelle les ritournelles de meneuses de claques. Do What U Want, à laquelle R. Kelly collabore, est assez réussie même si elle s’impose un peu comme un genre de plaisir coupable.
L’anti-Warhol, vraiment ?
Gaga a expliqué dans une entrevue avoir voulu faire le contraire de Andy Warhol. Celui-ci ayant voulu intégrer la culture pop dans l’art alors que Gaga a plutôt voulu faire l’inverse en mettant de l’art dans la pop. Au final, on se demande simplement où se trouve cet art. Si Venus doit en être l’aboutissement, on se dit que Boticelli doit se retourner dans sa tombe en voyant ce que l’artiste a fait de son oeuvre…
Il reste maintenant à voir comment Lady Gaga orchestrera la mise en scène de ce nouvel album, mais disons que pour le moment, sur disque, ça manque de substance. Parce que la simplicité a bien meilleur goût.
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