Scène Ontario – Le Chant du Siècle | Entrevue avec Neema Bickertsteth : « J’ai la sensation qu’aujourd’hui nous sommes façonnés par le passé »

A partir de ce soir (29 avril), le festival Scène Ontario ouvrira les festivités à Ottawa. Parmi les nombreux spectacles proposés, Le Chant du Siècle, une pièce mêlant chant classique, danse et projections, fera sa première mondiale au festival. Sors-tu.ca a pu discuter avec Neema Bickersteth, la tête d’affiche de cette pièce originale aux multiples facettes.

 

Un projet de longue date

Le Chant du Siècle est une pièce produite par la compagnie de théâtre torontoise Volcano, racontant l’histoire d’une femme noire au Canada durant un siècle entier, de 1915 à aujourd’hui. C’est Neema Bickersteth, chanteuse d’opéra et également comédienne qui jouera le rôle de cette femme traversant le siècle dernier.

L’idée de cette pièce entremêlant chant classique, danse et projections est venue il y a déjà 4 ans à Neema Bickersteth et Kate Alton, chorégraphe. L’intention était alors de faire de ce projet un spectacle qui se concrétisera avec la rencontre de Ross Manson, qui deviendra le metteur en scène de la pièce.

 

Un rôle multidisciplinaire endossé par une seule actrice

Le Chant du Siècle est un projet-clé dans la carrière de Neema Bickersteth, qui enchaînait jusqu’ici des rôles dans des pièces de théâtre. « J’ai commencé dans l’opéra, je suis d’ailleurs allée à l’école pour cela », nous explique-t-elle au bout du fil. « Puis. je me suis mise à jouer plus souvent, à faire des pièces de théâtre avec de la musique. Les récitals pour voix classique me manquaient, mais j’ai aimé tous les travaux expérimentaux que j’ai faits au théâtre. C’est vraiment une chance pour moi de rassembler ces deux arts ensemble. »

Car en effet, l’unique rôle de la pièce est joué par la chanteuse, qui pour l’occasion a dû se mettre à la danse, son personnage chantant et dansant au cours de la pièce.  « Je ne suis pas danseuse. J’adore danser et bouger mais je n’ai pas grandi entraînée comme une danseuse. C’est une partie du pourquoi cela a pris autant d’années à faire ! »

C’est donc une performance que Neema Bickersteth réalise ici, qui assure d’ailleurs avoir fait des pilates tous les jours pour s’entraîner. Un spectacle éreintant ? « C’est le bon mot en effet, éreintant ! […] Mais les chanteuses pop dansent et chantent en même temps tout le temps. Donc bien sûr que les chanteuses classiques peuvent le faire aussi ! »

 

Un siècle dans une histoire sans mots

La particularité du Chant du Siècle est que, comme son nom le laisse à croire, la pièce retrace l’histoire d’une femme noire canadienne sur un siècle complet.

Il a donc fallu faire de nombreuses recherches historiques sur la vie des femmes noires au Canada durant le siècle dernier pour créer le spectacle. Des recherches qui ont poussé Neema Bickersteth à se poser de nombreuses questions. « Je vois le voyage dans le siècle comme une façon de me replacer dans le temps également. Je suis une femme noire canadienne, et je me suis dit : « Qui aurais-je été en 1915 ? » […] J’ai alors pensé que j’avais une vie merveilleuse aujourd’hui, et je me suis replacée dans les années 1940. J’adore le Canada, mais soudain je me suis dit que ma vie aurait été totalement différente en tant que femme dans ces années-là. »

Une autre spécificité de la pièce est qu’elle ne comporte aucun mot, aucune phrase. Les chansons que Neema Bickersteth va interpréter n’ont pas de paroles, et le reste du spectacle se partage entre danses et projections. Un élément important selon l’actrice : « Je pense qu’il y a beaucoup de formes d’art qui n’ont pas besoin de mots. C’était un défi pour nous de raconter une histoire sans utiliser de mots. […] Nous avons décidé de choisir des chansons qui ne comportaient pas de mots pour que la danse puisse parler aussi, avoir de l’espace. »

 

Où sommes-nous rendus aujourd’hui ?

S’inspirant d’Orlando de Virginia Woolf et de In Search of Our Mothers’ Gardens d’Alice Walker, Le Chant du Siècle va ainsi permettre aux spectateurs de se poser des questions,  de se demander où nous en sommes aujourd’hui. Une vision que Neema Bickersteth conclut : « J’ai la sensation qu’aujourd’hui nous sommes façonnés par le passé. C’est une grande partie de pourquoi nous sommes ici, de ce que nous sommes et de ce que nous avons à offrir. »

* Le Chant du Siècle fera sa grande première ces 29 et 30 avril à 20h au Gladstone à Ottawa.

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