Moonface

Entrevue avec Spencer Krug | Moonface présente Julia With Blue Jeans On

L’ex-Wolf Parade et ancien Montréalais d’adoption Spencer Krug donnait récemment suite à son projet solo Moonface avec Julia With Blue Jeans Onun nouvel album piano-voix poignant et introspectif, créé dans son patelin scandinave temporaire (Helsinki, en Finlande). Sors-tu.ca a jasé avec le principal intéressé, alors qu’il se trouvait à Chicago, en pleine tournée.

Il y a bientôt deux ans, Spencer Krug quittait Montréal pour Helsinki, en Finlande. Après avoir officiellement rompu les liens avec ses projets de groupe Wolf Parade et Sunset Rubdown, Krug s’investit désormais à fond dans sa carrière solo sous le pseudonyme Moonface.

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Photo de courtoisie, par Tero Ahonen.

Krug est bien conscient que Moonface part dans toutes les directions. Un premier EP paru en 2010, Dreamland EP: Marimba and Shit-Drums, contenait une seule pièce de 20 minutes, avec pour seul instrument un marimba.  Il a rapidement donné suite à ce projet avec deux albums plus rock : Organ Music Not Vibraphone Like I’d Hoped en 2011, puis Heartbreaking Bravery, en 2012, avec le groupe finlandais Siinai. Un disque qu’il qualifie « d’album rock’n’roll de rupture et de rage ».

Et le voilà qui revient avec une quatrième parution en autant d’années, cette fois-ci piano-voix.  « Ça a peut-être rapport avec le fait de vieillir, ou c’est peut-être la réponse à mon album plein de rancoeur que j’avais fait juste avant, avec Siinai. Une partie de moi voulait revenir à quelque chose de plus optimiste et émouvant. Mon écriture s’est beaucoup simplifiée. C’est inconscient, mais en même temps, c’est un défi que j’aime bien de viser la beauté et la profondeur sans abuser des mots. »

Parlant de défi, le fait de se soustraire à tout arrangement en représentait un autre de taille. « Ironiquement, c’est un processus plus long. Il faut porter plus attention aux détails. Avant, je pouvais créer des arrangements, des textures. Cette fois, je voulais m’imposer cette contrainte : je devais m’asseoir au piano et composer à l’intérieur des possibilités de ce que mes deux mains et ma voix peuvent faire. »

« Je voulais reconnecter avec le piano acoustique. C’est quelque chose que je n’ai pas fait ces dernières années. J’étais excité à l’idée de me retrouver seul devant les touches. Ça m’a forcé à devenir semi-compétent avec l’instrument. »

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Moonface : un alter-ego libérateur

L’auteur-compositeur britanno-colombien – il est né à Penticton – ne voit pas Moonface comme un projet à géométrie variable mais plutôt comme un alter-ego. Bien que ce ne soit pas un objectif imposé, la variété étourdissante de son tracé sous ce pseudonyme lui convient parfaitement. “Je fais tout simplement ce que ça me tente de faire, lance-t-il de façon laconique. C’est la raison derrière Moonface : je voulais créer cet alter-ego qui puisse me permettre de faire n’importe quoi. Ce qui ne veut pas dire que je ne pourrais pas lancer trois albums de la même facture. Mais ça peut devenir n’importe quoi, et c’est très libérateur. »

Bien qu’il estime toujours apprécier de se frotter à d’autres musiciens – sa collaboration avec Siinai, avec qui il compose d’ailleurs de nouvelles chansons en studio, en étant un bon exemple – il admet tout de même que la liberté de création n’est pas la même dans ce nouveau contexte. « Ce n’est pas réaliste de vouloir tout chambouler dans une organisation démocratique comme un band. Ce serait étrange et impoli. Je n’aurais pas pu imposer à Wolf Parade de faire un album qui ne contienne que du marimba, évidemment. »

« Moonface provient de certaines frustrations causées par le fait de jouer dans des bands pendant si longtemps, avec des paramètres bien établis et des attentes précises de la part des fans. Les gens ne veulent pas entendre le même album d’une fois à l’autre, mais ils ne souhaitent pas non plus que tu t’éloignes trop de la recette originale. Ils ne veulent pas que les membres changent non plus. Les fans de Wolf Parade étaient contrariés par le départ de Hadji (Bakara, aux synthés), par exemple. »

Photo de courtoisie.

Moonface à Pop Montréal en septembre 2013. Photo de courtoisie.

Au départ, Sunset Rubdown devait servir à ça : lui permettre de s’éloigner des standards établis par Wolf Parade, mais « c’est rapidement devenu un groupe, avec des membres stables et des paramètres et un son établis aussi ».

Krug ne vise pas nécessairement de se réinventer à chaque occasion. Il aime bien, par exemple, la formule actuelle qui lui permet de partir en tournée seul, de salles en salles à condition que celles-ci aient accès à un piano.

Le chanteur et pianiste se rappelle d’ailleurs très bien de son concert à la Fédération Ukrainienne, à Montréal, à l’occasion du festival Pop Montréal en septembre dernier. Le concert avait un cachet particulier, puisqu’il avait lieu plus d’un mois avant la sortie de l’album. Personne dans la salle n’avait entendu la moindre note avant le concert. “Je crois que c’était beaucoup plus excitant de présenter les chansons alors que personne ne les avait entendues. Il y a un élément de surprise : personne ne sait ce qui s’en vient, sauf moi, qui dirige le bateau. Je me rappelle de m’être senti très décontracté, c’était pratiquement relaxant. C’est comme conduire seul : c’est relaxant, parce que tu es en plein contrôle. ”

Krug apprécie toujours autant la Métropole québécoise qu’il a quittée en 2011, mais bien qu’il considère de revenir habiter au Canada à nouveau, ce ne serait probablement pas à Montréal. « Je ne sais pas si je peux dire que je m’ennuie de Montréal en soi, lance-t-il en toute franchise. Je ne m’ennuie certainement pas des étés suffocants de Montréal. Pour ce qui est de l’hiver, le climat de Helsinki est très semblable. La grande différence, c’est l’obscurité. Les étés, en revanche, sont plutôt doux et il fait clair jusqu’à minuit. Ce n’est pas tant une question de climat, donc. J’aime toujours revenir à Montréal, lui rendre visite et je m’ennuie des amis que j’y avais, mais y habiter de nouveau, j’aurais l’impression que ce serait un peu comme un pas vers l’arrière. »

Sera-t-il au moins de retour bientôt à Montréal pour un autre concert, maintenant que l’album est sorti ?  “Le plus tôt que ça pourrait arriver, ce serait mars ou avril. Je suis présentement en tournée américaine, avec un arrêt à Vancouver. Ensuite ce sera l’Europe, le Japon, puis le temps des Fêtes. Je ne sais pas encore ce qui arrivera pour le printemps prochain. Tout ce qu’il faut, c’est un producteur local qui veule bien trouver un piano et une salle… »

 

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