Slowdive à l’Olympia | Une soirée sublimement shoegazey
À l’instar du métal ou du jazz, le shoegaze est un genre musical qui peut être difficile à apprivoiser. Avec ses guitares distordues, ses effets de réverbération, ses voix submergées et sa facture sonore saturée (certains diront « cacophonique »), le shoegaze ne sera jamais le style le plus unanimement rassembleur en ville. Qu’à cela ne tienne, le genre compte aussi un grand lot d’adeptes, assez pour remplir à craquer l’Olympia un mardi soir glacial. Le groupe Slowdive, véritable pilier du shoegaze et de la dream pop, était de passage en ville, et laissez-moi vous dire que c’était quelque chose!
Revenu en force dans le paysage musical en 2014 après plus de 19 ans de silence – certains membres ont néanmoins créé le groupe Mojave 3 pendant cette longue pause –, Slowdive a enfin fini par obtenir les lettres de noblesse qu’il méritait depuis tout ce temps, gagnant de nombreux adeptes au passage.
On s’étonne en effet de constater la présence aussi massive de jeunes des générations Y et Z, qui n’étaient pas en âge d’avoir vécu la première ère musicale de la formation britannique (entre 1989 et 1995). Il y avait aussi, bien sûr, plusieurs quarantenaires et cinquantenaires pour venir équilibrer tout ça.
* Photo de courtoisie fournie par Adrien Conilh de Beyssac.
Ça valait la peine de braver le froid polaire pour assister à cette grand-messe shoegazey : dès les premières notes d’Avalyn en lever de rideau, on est happés par un véritable mur de son fuzz auquel se superpose la voix parfaitement vaporeuse de la chanteuse Rachel Goswell, également à la guitare, aux claviers et au tambourin. À ses côtés, Neil Halstead, deuxième chanteur et guitariste du groupe, ajoute sa voix mélodieuse à l’ensemble pour former un beau tandem en alternance entre les couplets, notamment lors de No Longer Making Time ou Souvlaki Space Station, toutes deux formidablement bien rodées et interprétées.
* Photo de courtoisie fournie par Adrien Conilh de Beyssac.
Avec 5 albums et plusieurs EP au compteur en plus de 30 ans, Slowdive jouit d’un beau catalogue de morceaux parfois planants, parfois plus rentre-dedans. En un peu moins de 90 minutes, rappel inclus – une bonne durée pour un tel spectacle qui peut difficilement durer 2h30 sans s’essouffler –, le groupe a enchaîné une setlist de 15 morceaux tantôt plus raffinés, tirés de leur dernier album de 2023 (shanty, kisses, chained to a cloud) tantôt plus anciens (Avalyn, Catch the Breeze ou l’excellente Crazy for You pour ne nommer que celles-là).
Le groupe nous réservait néanmoins beaucoup de Souvlaki en fin de parcours ainsi qu’au rappel, et c’est on ne peut plus normal considérant à quel point cet album de 1993 contient la majorité des morceaux plus connus et appréciés des fans comme Souvlaki Space Station, Alison, Machine Gun ou encore When the Sun Hits, qui a engendré de petites séances de headbanging chez les plus jeunes.
En bon groupe shoegaze, Slowdive a limité au strict minimum ses interactions avec le public, ponctuant ça et là sa prestation de quelques « thank you » bien sentis. On sentait néanmoins que les cinq membres de la formation étaient contents d’être là, et surtout de constater que leur musique attire désormais un large public renouvelé, ce qui n’était pas le cas à leurs débuts – la preuve qu’il faut toujours persévérer dans la vie!
* Photo de courtoisie fournie par Adrien Conilh de Beyssac.
On ne peut pas en dire autant pour Quannnic en première partie, qui a passé la quasi-totalité de son set de 45 minutes à regarder par terre et fuir le regard du public : une attitude parfaitement shoegazey, qui a néanmoins affecté sa prestation aux influences noise et lo-fi. Ses compositions, plus tonitruantes que celles du programme principal, sont ainsi un peu « passées dans le beurre », si je peux me permettre cette expression. Dommage, car Quannnic bénéficiait d’une salle déjà presque pleine pour se faire valoir, ce qui n’est pas toujours le cas lors d’une première partie.
Concluant sa prestation avec les très envoûtantes Machine Gun et 40 Days, qui se suivent toutes deux sur Souvlaki, Slowdive a renvoyé tout le monde affronter le froid hostile de janvier, la tête bourdonnante de sonorités rêveuses (shoegaze et dream pop sont souvent des vases communicants). Certains auront sans doute eu l’envie de se replonger dans la discographie de ce groupe ayant trop longtemps été snobé par la critique.
Mission accomplie en ce qui les concerne!
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