DVTR aux Foufounes électriques | Lancement de l’album Bonjour (bis)

Un véritable bouillonnement éclectique de musique québécoise a animé hier soir un rayon de 100 mètres du Quartier des spectacles.

En descendant la rue Saint-Laurent depuis la station de métro, on croisait devant le Club Soda les amateurs de pop-rock impatients de découvrir sur scène l’Album bleu de la talentueuse Marie-Pierre Arthur, sorti en août dernier et avec qui la collègue Juliette Perron a discuté récemment.

À un coin de rue, ceux qui voulaient célébrer les 20 ans du premier succès électro québécois, l’album Chill ‘Em All, ont retrouvé DJ Champion et ses G-Strings pour une soirée, m’a-t-on dit, très dansante au MTelus.

Pour notre part, on a continué notre chemin vers les Foufounes électriques pour s’offrir une soirée bruyante, celle du lancement de l’album Bonjour (bis), la version « deluxe » du premier microalbum Bonjour du duo punk DVTR, paru en novembre 2023.

DVTR – C’est dangereux, mais on aime ça!

Dès la sortie de leur premier simple homonyme en avril 2023, DVTR a créé un véritable raz-de-marée dans la scène musicale. Rapidement, le son caractéristique du duo formé de Laurence G-Do (alias Demi Lune) et JC Tellier (alias Jean Divorce) était forgé: musique rapide et incisive, paroles satiro-mordantes et anarcho-absurdes. Tout aussi rapidement, leur réputation de mettre le feu aux poudres à chaque spectacle s’est répandue. On ajoute à tout cela une image visuelle forte, et on a tous les ingrédients pour en faire un groupe culte.

C’est donc sautillant et vêtus de peignoirs de boxe rouge éclatant que Demi Lune et Jean Divorce sont apparus, symbolisant ainsi les victoires qu’ils accumulent depuis plusieurs mois.

En novembre 2023, on disait d’eux : « C’est dangereux, mais on aime ça. ». Le danger ne connaissant ni frontières ni barrières de langage, leur première victoire est celle d’avoir foulé, telles des mines antipersonnelles en quête de territoire, les scènes des pays du saké, soju, gin, Jägermeister, cognac, tequila et whisky, avant de revenir au pays de la Labatt 50 tablette.

Un retour chez soi marqué par la victoire de trois Luciens raflés au GAMIQ à la fin novembre, dans les catégories Révélation de l’année, Album/EP Punk de l’année et Vidéoclip Animation de l’année.

Puis, la dernière mais non la moindre, celle de s’offrir un lancement d’album aux Foufounes électriques à guichet fermé. Soirée pendant laquelle DVTR a, sans surprise, honoré sa réputation. Dès les premières notes de Crématorium en ouverture, on a retrouvé la fougue, la rapidité et la folie punk qui caractérisent les performances de DVTR. Stage diving, body surf, tout y était!

Ils étaient accompagnés de cinq acolytes masqués, trois musiciens et deux vidéastes dont les déplacements nerveux et énergiques à travers les musiciens se sont ajoutés au chaos, ne laissant aucune place à la monotonie.

Ils ont joué un total de 13 titres en 45 minutes, dont tous ceux de leur album, un set caractéristique des groupes punk. Par contre, le bagage musical de Laurence G-Do (aussi dans le groupe électro-pop Le Couleur) et JC Tellier (du groupe feu Gazoline) leur confère une riche diversité musicale qui n’est pas toujours l’adage de la scène punk. Sur Fruits frais, la basse taille mélodiquement sa place, on entend une touche rock psychédélique sur Les Olympiques, et les influences de cold wave sont marquantes sur Les flics (sont des sacs à merde). Le refrain de cette dernière a d’ailleurs joyeusement été repris en boucle par la foule, qui semble-t-il en avait gros sur le cœur. Comme un écho à la soirée électro de DJ Champion, lors de la reprise de Pied de poule, les Foufs se sont transformés en un immense plancher de danse.

Ce fût une courte mais explosive soirée qui s’est terminée d’une manière peu conventionnelle, à l’image du groupe. Lorsqu’ils ont quitté la scène, les lumières sont restées fermées, nous laissant croire qu’il y aurait un rappel. Mais quelques secondes plus tard, une musique électro a commencé à jouer, nous laissant croire qu’ils ne reviendraient pas. Après quelques minutes de confusion, on a bien compris qu’ils avaient tout donné, et qu’il faudra attendre une prochaine fois pour continuer de vivre la folie contagieuse de DVTR.

Nüshu – Une performance chirurgicale

C’est le groupe de math-rock Nüshu (prononcé nouchou) qui a ouvert la soirée. Notre collègue avait fait une belle revue de leur passage au Coup de cœur francophone plus tôt cet automne.

Jessica Pion (voix, basse), qui avec Jerry Lee Boucher (guitare) a fait partie des différentes configurations de la formation depuis ses débuts, a souligné hier que l’année 2024 marquait les 10 ans de carrière de Nüshu. Depuis leur premier microalbum, EP 2014, ils ont sorti Topless Communiste (2016), Sexe Étranger (2019) et Nüshu (2023). Les deux autres membres du groupe, Lydia Champagne (batterie) et Navet Confit (guitare), font partie de la formation depuis l’album Sexe Étranger.

Le math-rock est marqué par des changements fréquents de signature rythmique, et on était curieux d’entendre comment ça serait rendu sur scène. C’était impressionnant de constater que les fréquents changements de rythmes et de sonorités à même les titres étaient exécutés avec main de maître, une performance digne d’une équipe de chirurgiens à cœur ouvert.

La performance de Nüshu a certainement ravi les avides de sonorités dissonantes, et ils étaient nombreux hier aux Foufs. C’est un rock où on se retrouve toujours en déséquilibre entre deux états musicaux confortables, un rock qui ouvre de nouveaux canaux neuronaux… un rock pour devenir plus intelligent!

On s’en voudrait de passer sous silence la performance de la batteuse Lydia Champagne, qui piloté la performance avec une maîtrise exceptionnelle du rythme tout en dégageant le sourire d’une enfant dans un magasin de jouets la veille de Noël. Cette légèreté qui contraste avec la complexité rythmique de leurs titres a largement, pour ma part, agrémenté le rendu scénique. Peut-être faudrait-il revoir la configuration sur scène pour la mettre davantage en avant-plan.

En tous les cas, pour les fans de math-rock et de performances musicales chirurgicales, Nüshu est définitivement un groupe à voir en spectacle.