crédit photo: Marie-Emmanuelle Laurin

Osheaga 2024 – Jour 1 | Parcours entièrement féminin et savoureusement varié

Pendant que certains festivals se plaignent qu’on leur reproche l’absence de parité de leur programmation — voire même l’absence de femmes carrément — Osheaga n’a visiblement aucun problème à remplir le parc Jean-Drapeau avec une affiche généreuse en artistes féminines et non-binaires. En ce premier jour de l’édition 2024, le parcours qui s’est dessiné pour l’auteur de ces lignes s’est avéré presque entièrement féminin… sans même faire d’effort.

N’en déplaise aux fans de Noah Kahan, qui concluait la soirée du vendredi avec sa musique s’apparentant à un mélange remâché de Vance Joy, Hozier, Mumford & Sons et The Lumineers, une bonne partie de la foule réunie au Parc Jean-Drapeau était là pour celle qui le précédait sur la grosse scène voisine : Melanie Martinez.

Même douze ans après sa participation à The Voice, l’excentrique chanteuse pop new-yorkaise perdure et retient visiblement encore l’attention.

Son univers visuel y est pour beaucoup : en exploitant le filon de l’imagerie enfantine tordue, à la sauce vaguement gothique pour adeptes de, genre, Wednesday sur Netflix, Melanie Martinez a créé une iconographie qui permet à son imaginaire de circuler, voire d’entretenir quelque chose comme un culte.

Dès son entrée sur scène, d’immenses personnages de lapins creepy dansent à la manière d’une longue chorégraphie TikTok, pendant que l’écran en arrière-scène projette un décor de chambre d’enfant, qui prendra vite en feu. Ça donne le ton. D’ailleurs, les animations sur écran pour les quelques cinq ou six premières chansons finiront toutes par un incendie. Petit côté glauque plutôt sympathique.

Des titres comme Cry Baby, Dollhouse, Sippy Cup, Soap et Play Date se succèdent, pigeant autant dans son répertoire de début de carrière que dans ses parutions récentes.

Photo par Marie-Claire Denis.

Le public en raffole, et bien qu’on ne réinvente pas la roue musicalement parlant, force est d’admettre que la direction artistique est claire, assumée et efficace.

Pour une approche musicale plus, disons, sauvage, il y avait Mannequin Pussy plus tôt dans la journée. Et on est passé bien près de ne pas les avoir avec nous…  Le groupe a annoncé récemment l’annulation d’un paquet de dates de spectacles prochainement, laissant la présence à Osheaga toutefois intacte. La raison? Le surmenage. On les comprend : ce serait apparemment leur 65e concert en 2024. Ouch.

La chanteuse Marisa « Missy » Dabice l’a d’ailleurs abordé en précisant que lorsque notre corps nous parle, on doit l’écouter… avant d’inviter la foule entière à laisser sortir un immense cri de colère collectif.


* Photo par Marie-Emmanuelle Laurin

La fatigue se sentait en début de prestation pour Mannequin Pussy, mais après quelques chansons un peu molles, Missy a pris un moment pour dénoncer les religions, la politique, le monde atroce dans lequel on vit avec véhémence, avant d’entamer l’une de leurs meilleures chansons, I Got Heaven. Et à partir de là, c’était franchement punk jusqu’à la toute fin. Des titres comme Control, Aching et Perfect ont mis le ton, suivies de la violente Ok Ok Ok, au cours de laquelle Missy alterne le chant et les cris avec le bassiste Colins « Bear » Regisford, qui prenait ensuite les rênes pour Pigs Is Pigs. 

Revendicateur, furieux, acerbe, le rock de Mannequin Pussy ne manque certainement pas de mordant sur disque, et encore moins sur scène. Même quand le groupe est épuisé. Chapeau!

* Photo par Marie-Emmanuelle Laurin.

Entre les deux, on a eu droit à une performance somme toute assez sage de l’excellente Arlo Parks, qui en était à sa première présence en festival au Canada. Les chansons de son plus récent album My Soft Machine, paru en 2023, paraissent toutefois un peu plus pâles que celles de l’excellent Collapsed in Sunbeams, qui l’a propulsée en janvier 2021, comme Hurt, Eugene (que l’artiste admet être inspirée de son groupe préféré à vie, Radiohead), et « la plus dansante de mon répertoire, pour ce que ça vaut », Too Good.

Une performance charmante, mais tout de même moins explosive que l’impression qu’elle nous avait laissée au Théâtre Beanfield en mars dernier.

* Photo par Marie-Emmanuelle Laurin.

Plus tôt en journée, Blonde Redhead captait notre attention en débutant son spectacle avec une excellente chanson d’il y a 20 ans, Falling Man, avant de poursuivre avec un très bon mélange de nouveaux titres et de pièces éprouvées. On aime ou on déteste, mais le timbre de voix de la chanteuse et musicienne Kazu Makino fera toujours son effet et les frères jumeaux Simone (batterie) et Amedeo Pace (guitare, chant) complètent à merveille ce trio de vétérans. 45 bonnes minutes de musique, sans artifices. Même si on déplore l’absence de l’excellente Elephant Woman de la grille de chansons.

* Photo par Marie-Claire Denis.

On a aussi brièvement eu l’occasion de goûter au matériel solo de Romy, membre du groupe The XX, sur la scène de l’île. Son approche beaucoup plus électro/EDM contraste avec les subtilités des arrangements de son groupe qui avait marqué les esprits il y a près de 15 ans (déjà!), mais des chansons comme The Sea, She’s on My Mind, Twice et Did I (chanson sur laquelle a collaboré Peaches), ainsi qu’une reprise/remix dansant d’Angels, de son groupe The XX, ont plu à la foule. Un mashup de 1998 de Binary Finary et d’Into You d’Ariana Grande a aussi séduit le public.

* Photo par Marie-Claire Denis.

On aurait bien ajouté Sleater-Kinney à cette liste, mais le groupe de Carrie Brownstein a dû annuler moins de 48 heures avant l’événement.

En revanche, l’équipe de programmation a remodelé l’horaire, et ajouté à la dernière minute le trio de Brooklyn Fcukers, mené par la chanteuse Shanny, qui danse allègrement sur la musique inspirée de la dance music des années 1990, avec une touche vaguement punk.

Le trio a débuté avec une reprise de Devil’s Haircut de Beck, avant d’enchaîner avec leurs propres chansons Homie et Punk. Sans juger en ayant vu seulement trois chansons, disons que ça se ressemble un peu d’un titre à l’autre, mais la dégaine de la bande est plutôt rafraîchissante.

* Photo par Marie-Claire Denis.

Le festival se poursuit samedi avec les vieux de la vieille : Green Day, The Smashing Pumpkins et Rancid, ainsi que le phénomène Chappell Roan qui débarque en ville pour une prestation… à 15h30!  Arrivez tôt, ça va être bondé dès l’ouverture!

Nos photos en vrac

Melanie Martinez

Photos par Marie-Claire Denis.

Mannequin Pussy

Photos par Marie-Emmanuelle Laurin.

Arlo Parks

Photos par Marie-Emmanuelle Laurin.

Blonde Readhead

Photos par Marie-Claire Denis.

Romy

Photos par Marie-Claire Denis.

Brooklyn Fcukers

Photos par Marie-Claire Denis.

Vos commentaires