Les Soeurs Boulay

Les Soeurs Boulay au Théâtre Granada | Des retrouvailles fort attendues

Le public, bien que masqué, était tout sourire hier à la sortie du Théâtre Granada. Les retrouvailles avec les arts de la scène ont comblé les spectateurs qui, pour la plupart, profitaient de leur premier spectacle en un an. Ils n’étaient pas seuls: les musiciens sur scène étaient eux aussi fébriles à l’idée de performer devant public pour la première fois depuis si longtemps.

Le Théâtre Granada semblait plutôt grand avec ses tables disposées à deux mètres de distanciation et ses quelques spectateurs au balcon.

Les Soeurs Boulay entrent sur scène et commencent en force. Est-ce à cause de la salle trop vide que le son paraît cacophonique? L’interrogation disparaît quand on reconnait les paroles de Par le chignon du cou. Mélanie et Stéphanie Boulay, ainsi que leurs musiciens Gabriel Gratton et Francis Mineau, respectivement à la basse et à la batterie, sont tous à deux mètres, mais démontrent leur entrain habituel.

« Va-t-on survivre à ce choc d’adrénaline? », lance Stéphanie après cette première chanson.
« Notre souhait est que les arts vivants arrêtent d’être morts. »

La chanson Cul-de-sac débute avec son air mélancolique, avant un plus long intermède où les deux soeurs s’adressent au public :

– « Est-ce que c’est votre premier show? »
– « Ouiiiiiii »
– « Nous aussi. Très honorées de vivre ça avec vous. »

Les Soeurs Boulay s’amusent à nous donner des nouvelles de leur dernière année. Mélanie nous lance : « j’ai un bébé avec moi », en nous montrant sa bédaine. Et Stéphanie de rétorquer : « je suis la maman de 30 poules », avant de lancer « on sait que Mélanie a fait l’amour au moins une fois dans la dernière année ». Les soeurs se taquinent et le ton est léger. On sent qu’elles sont bien sur scène, et heureuses d’être de retour.

Mélanie se lance dans des confidences liées à l’accouchement : « Savez-vous comment ça feel de faire passer une boule de quille dans une paille? ». Un léger malaise plane, mais ça reste sympathique et convivial.

 

Le ton change du tout au tout quand elles disent avoir appris cette année que : « La moitié des gens de notre milieu sont des pas bons… » Silence radio dans la salle. Stéphanie se rattrape : « Mais y’en reste encore des bons! On est contentes d’être là. »

 

Souhaits, rêves et questionnements

La suite devient plus intimiste, quand des images vidéo de leur jeunesse apparaissent à l’arrière-plan. Un moment presque solennel prend place lorsque les filles se lancent dans le partage de quelques souhaits qu’elles ont reçus de la part du public. On sent leur désir de créer une relation de proximité avec les spectateurs. Le souhait le plus grand de tous est lancé: « la fin de la Covid ».

Mélanie s’installe au piano pour chanter Léonard. C’est doux, intimiste. Cette chanson, dédiée à son fils, est pleine de vérités: « On a beau mettre au monde, on ne possède personne. Et nos branches font de l’ombre si trop près tombe la pomme. »

L’ensemble des chansons de l’album La mort des étoiles démontre une plus grande maturité des deux jeunes femmes. Leurs paroles finement rédigées évoquent à maintes reprises l’immensité de la vie et toutes les questions qui peuvent s’y présenter. Cet album, publié en 2019, reste tout à fait actuel deux ans plus tard, alors que la société a vécu beaucoup de questionnements dans l’année chamboulante qui vient de passer. Les filles l’évoquent même au milieu du spectacle: « Quand on était jeunes, on rêvait à des petites choses, genre manger deux gommes ou du Kraft Dinner. Quand il fait noir longtemps, on aime se rappeler de ces petites choses. »

 

Mercis, masques et immensité

Les musiciennes se font généreuses et nous offrent une quinzaine de chansons de leurs trois albums (Le poids des confettis (2013), 4488 de l’Amour (2015) et La mort des étoiles (2019)) avant que leurs remerciements débutent et qu’on comprenne que la conclusion approche. Les mercis, eux aussi, sont teintés de l’année qui vient de passer:

« Merci au personnel hospitalier.
Merci aux enseignants.
Merci aux jeunes qui donnent espoir.
Merci aux vieux qui trouvent que les jeunes sont cool. »

La douceur, la franchise, la chaleur et la complicité des Soeurs Boulay étaient au rendez-vous hier soir. Nous ne pouvons que souhaiter, comme elles le disaient, de se revoir bientôt, sans masque, pour partager nos sourires.

Après leur dernière chanson annoncée, le public se lève et applaudit chaleureusement. Est-ce encore une surprise de faire un rappel de nos jours? Évidemment qu’elles reviennent sur scène! La conclusion du spectacle est la même que celle de l’album La mort des étoiles : la chanson Immensité. Cette finale laisse le public pensif :

« Merci à toi l’immensité
De nous porter dans le grand tout
[…]
Le temps fera d’autres saisons
Et le silence sera doux
Dans l’espace laissé en nous »

Au final, cette année de lenteur et de pause généralisée ne sera bientôt qu’un vague souvenir dans l’histoire de nos vies. Ou, du moins, c’est ce qu’on espère…

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