Prix Gascon-Roux au TNM | Hommage à Lorraine Pintal
Les Prix Gascon-Roux ont été créés en 1986 par Olivier Reichenbach, alors directeur artistique du Théâtre du Nouveau Monde, pour honorer la mémoire des fondateurs Jean Gascon et Jean-Louis Roux. La remise annuelle des prestigieuses récompenses lundi soir aura été de pair l’occasion d’un vibrant hommage rendu à Lorraine Pintal pour ses 25 années à la barre du TNM, le plus national des théâtres montréalais.
La grande metteure en scène qui a illustré et défendu des auteurs devenus incontournables dans notre dramaturgie, comme Marcel Dubé, Claude Gauvreau, Michel Tremblay et Réjean Ducharme, s’est même vu remettre pour la première fois un Prix Gascon-Roux pour La Bonne âme du Se-Tchouan de Brecht, ex aequo avec René Richard Cyr pour son mémorable Caligula de Camus.
Les deux pièces ont d’ailleurs récolté le plus grand nombre de prix, soit celui de l’interprétation féminine par Isabelle Blais, de la conception des décors par Danièle Lévesque et de la conception sonore par Philippe Brault pour ce texte rarement joué de Brecht, alors que Caligula a consacré Benoît McGinnis comme meilleur acteur et Erwann Bernard meilleure conception d’éclairage.
La comédienne Catherine Trudeau quant à elle a reçu ex aequo le convoité Prix de la meilleure interprétation féminine pour son rôle coquin de Lisette dans Le Jeu de l’amour et du hasard. La pièce de Marivaux aura valu aussi à Judy Jonker la meilleure conception des costumes.
Il est important de le rappeler, les Prix Gascon-Roux sont remis par le vote des quelque 10 500 abonnés du TNM. C’est le sculpteur Michel Goulet, accessoirement scénographe de Denis Marleau, qui a conçu le trophée sous la forme d’un morceau de casse-tête, rappelant que le théâtre est une affaire de gang dont chaque membre est essentiel à la réussite d’un tout.
Au cours de son long règne, Lorraine Pintal est venue ajouter d’autres prix et bourses à cette soirée, comme le Prix Olivier-Reichenbach de la relève attribué cette fois-ci à Gabriel Lemire pour son rôle de Benvolio dans Roméo et Juliette de Shakespeare. Pour sa part, la Bourse à la création Jean-Louis Roux est une résidence d’écriture qui revient aux deux ans, en alternance avec la Bourse Jean-Pierre Ronfard qui offrira un terrain d’exploration inestimable pour le metteur en scène Florent Siaud avec son Britannicus de Racine prévu pour la saison 2018-2019.
Enfin, nouvellement créée et d’une valeur de 1 000 $, la Bourse Inclusion et Équité s’ouvrant à la diversité culturelle a été attribuée pour cette première fois à la comédienne noire Nadine Jean qui bénéficiera en même temps d’un stage de formation sur la production Vu du pont d’Arthur Miller qui sera à l’affiche du TNM en novembre prochain.
La cérémonie festive, comme en famille, était animée par Normand Chouinard qui a comparé le travail avisé de Lorraine Pintal au défi de « faire les finales à chaque année ». Pascale Bussières, René Richard Cyr, Marie Tifo, Alice Ronfard, Michel Tremblay sur vidéo, Sophie Prégent, Dominic Champagne, Danièle Lévesque et même Robert Lepage sont venus tour à tour témoigner au micro de leur admiration pour la patronne des lieux, en reconnaissance de son apport artistique incomparable à l’histoire du TNM.
Tous ces artistes ont parlé du dynamisme à tout crin de Lorraine Pintal et de son énergie contagieuse de cheftaine, telle une gladiatrice secouant avec force et courage les colonnes du temple, de son sens aiguisé du travail en équipe, de son audace et de sa sensibilité, du discernement dans ses choix artistiques, de son souci de faire connaître la relève, de sa créativité infatigable, de son intelligence émotive, de son amour pour les acteurs et, en un mot, de son flair qui fait que les spectacles qu’elle programme au TNM se voient très souvent ajouter des supplémentaires.
Cet hommage n’aurait pas été complet sans les mots d’appréciation adressés par eux tous envers Loui Mauffette, l’attaché de presse du TNM qui aime se définir comme attaché de cœur. René Richard Cyr a parlé de la « sincérité épeurante » du fils de Guy Mauffette qui possède ce doigté intangible pour soutenir en douceur et « chouchouter » ces grands sensibles que sont les artistes de théâtre.
Tel un couple dépareillé mais qui se complète, Loui Mauffette et Lorraine Pintal auront avec bonheur tenu le gouvernail de cet immense bateau ivre qu’est le TNM, voguant sur les eaux tumultueuses de la création théâtrale depuis un bon 25 ans d’excellence et de succès hautement mérité.
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