Yes avec Jon Anderson, Trevor Rabin et Rick Wakeman de passage au Québec | Le retour de l’enfant prodige!
La dernière fois que Trevor Rabin avait mis les pieds sur une scène montréalaise sous la bannière du groupe Yes, c’était le 1er septembre 1994, au Forum. Deux décennies plus tard, mardi soir, le public excité du St-Denis, qui semblait afficher salle comble, a accueilli le guitariste de 63 ans avec une ovation debout, moment émouvant. Le musicien, qui effectue grâce au projet « Yes featuring ARW » un retour à la vie de tournée après une longue absence, a semblé touché. Retour sur le passage de Yes au Québec, avec des photos du show de lundi à Québec, et un compte-rendu du concert à Montréal.
En compagnie du chanteur original de Yes, Jon Anderson, et de Rick Wakeman, le claviériste le plus célèbre (et coloré !) du groupe, Trevor Rabin revisite avec cette tournée le répertoire de Yes des années 70, 80 et 90 pour le plus grand bonheur des amateurs. Il y a deux formations nommées Yes en ce moment qui se promènent à travers le monde (c’est compliqué…), et les fans sont divisés à savoir laquelle est la plus légitime. Disons qu’Anderson, Rabin et Wakeman travaillent très fort pour tirer la couverture de leur côté en offrant un spectacle époustouflant.
Pour des hommes tous passés la soixantaine, les trois musiciens proposent une soirée énergique. Oui, bon, certaines chansons on vu leur tempo ralenti, ce qui arrive souvent avec certains groupes vieillissants. And You And I, entre autres, était un peu molle, quoique toujours aussi touchante. Et pendant la première section de South Side of the Sky, le groupe ne semblait jamais totalement sur la bonne note, surtout Anderson. Grâce à Lee Pomeroy, qui aidait avec les harmonies vocales, Anderson a pu recentrer son chant. La partie vocale au milieu de la chanson fut particulièrement réussie.
Pomeroy, c’est également le bassiste qui a la tâche, dans cette formation, de remplir les énormes chaussures du bassiste de Yes, le défunt Chris Squire, et qui le fait avec aisance et bonne humeur. Son solo dans Heart of the Sunrise, et celui de Owner of a Lonely Heart, démontraient clairement son talent ainsi que sa joie d’être sur scène.
Un autre musicien se joint à la formation : Lou Molino III, un vieux collaborateur de Trevor Rabin du temps de sa carrière solo qui, à la batterie, arrive non seulement à émuler le travail sensible et jazzé de Bill Bruford, et celui plus « carré » d’Alan White, mais également à y apposer sa propre patte. Il a fait un excellent travail tout au long de la soirée.
Mais bon, qu’en était-il du grand retour de Rabin au sein de Yes ? Celui qui a passé les vingt dernières années enfermé dans son studio à composer la musique des plus grosses productions hollywoodiennes n’a finalement rien perdu de son talent de guitariste. Ça lui sort des dix doigts avec une aisance incroyable. Dès les premières notes de Perpetual Change, au début du spectacle, on pouvait s’en rendre compte. Et c’était encore plus flagrant sur ses propres compositons, comme la puissante Hold On, un superbe moment de ce superbe concert.
C’est grâce à cette chanson, ainsi que Changes (l’une des meilleures du répertoire de Yes…), entre autres, que le musicien sud-africain a électrifié et carrément ressuscité Yes en 1983. Ce jeune prodige de la guitare, à l’époque, a fournit un souffle nouveau à ce groupe qui s’était perdu dans les méandres des extravagances du rock progressif (et les nombreuses chicanes internes).
Changes, mardi soir, permettait d’entendre, pour la première fois au cours du spectacle, Rabin chanter en tant que vocaliste principal. Allait-il encore être capable d’atteindre les notes qu’il chantait si aisément il y a plus de trente ans ? Et puis arriva ce moment de la chanson, « We’ve given up pretending, As if you didn’t caaaaaaaaaaarre ! », et ce fut la confirmation que le Rabin d’antan était bel et bien de retour ! La belle voix, l’émotion au coeur de celle-ci, la guitare en feu, le look d’un gamin qui s’amuse : Trevor Rabin impressionne encore.
Si on a eu droit à quelques titres de « la période Rabin », tel que Rhythm of Love (qui nous a valu un entraînant solo de moog de la part de Rick Wakeman), ou encore la méconnue mais ô comben émouvante I Am Waiting (de l’album Talk, le dernier auquel Rabin a contribué), la sélection de chansons laissait un peu à désirer, au final, pour quiconque aurait aimé que le groupe nous sorte des perles des boules à mite. Au menu, on a plutôt eu droit aux mêmes chansons entendues des milliers de fois dans toutes les tournées de Yes, les éternelles Heart of the Sunrise (tout de même l’un des moments forts de la soirée – ça a toujours cet effet-là sur le public, et avec raison…) et bien sûr, Roundabout, jouée en rappel. Tous les concerts de Yes doivent se terminer par cette pièce, on croirait que c’est une règle écrite quelque part.
Et Awaken… jouée si souvent par Yes au fil du temps… mais bon, on ne peut pas trop se plaindre: Awaken est un chef-d’oeuvre. Le moment fut magique.
Mais pourquoi ne pas profiter de la présence de Trevor Rabin sur scène pour jouer Endless Dream, ou Hearts ? Où étaient les Love Will Find a Way, It Can Happen, ou encore Lift Me Up ? D’ailleurs, aucune chanson de l’album Union ne fut jouée mardi soir. Est-ce parce que, comme tous les fans de Yes le savent, Rick Wakeman déteste particulièrement ce disque ?
Enfin…pour un retour sur scène de Rabin, c’était tout de même très réussi. Le public s’est levé debout après chaque chanson pour l’acclamer, et même si Jon Anderson (qui a le sourire plus gamin que jamais et une énergie surprenante pour un homme de 72 ans) et Rick Wakeman ont pris les devants à plusieurs reprises, Trevor Rabin était de toute évidence la vedette du spectacle. Molino III et Pomeroy, relégués à l’arrière de la scène, ne servaient que de soutien rythmique, même si on sentait la camaraderie entre les cinq hommes tout au long de la soirée. Anderson atteint encore les notes aigues, et Rick Wakeman joue des claviers avec la dextérité qu’on lui connaît, mais le spectacle est conçu pour mettre en évidence le jeu de Trevor Rabin.
Et juste avant le rappel, pour la première fin du spectacle, c’est bien sûr au plus grand succès commercial du groupe, Owner of a Lonely Heart, que l’on a eu droit. Composée par Trevor Rabin alors qu’il était assis aux toilettes, selon la légende, ce succès planétaire continue d’exciter les foules. Et vers la fin de la chanson, Rick Wakeman, jouant de la guitare-piano, et Trevor Rabin, sont descendus dans le public, chacun de leur côté de la scène, pour aller se rejoindre au milieu de la salle et jouer entourés de leurs fans. Serrant des mains et souriants, on pouvait voir à quel point Rabin et les autres membres du groupe prenaient plaisir à être là.
Et c’est ce que l’on désire de Yes. On ne veut rien savoir des chicanes entre les membres des deux formations qui se font appeler Yes en ce moment. On veut du positivisme. Jon Anderson a quitté la scène en proclamant à quelques reprises « Give love each day » (qui est également le titre d’une chanson du groupe). Et voilà, tout était dit.
Le public a quitté la salle en écoutant la mélodie enregistrée de Life on Mars de David Bowie, au piano, telle qu’endisquée par Rick Wakeman l’an dernier, en hommage à son défunt ami (Wakeman a joué sur la pièce originale de Bowie). Une belle façon de terminer cette soirée forte en émotions.
Et souhaitons revoir ce quintet, qui est probablement le seul et véritable Yes, très bientôt par chez nous !
Liste des chansons:
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Cinema
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Perpetual Change
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Hold On
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South Side of the Sky
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And You and I
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Changes
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Rhythm of Love
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I Am Waiting
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Heart of the Sunrise
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Awaken
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Owner of a Lonely Heart
- Rappel:
Roundabout
- Artiste(s)
- Jon Anderson et Rick Wakeman, Yes
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Théâtre St-Denis
- Catégorie(s)
- Progressif,
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