TwoSet Violin à la Salle Désilets | Les YouTubeurs de la musique classique relèvent le défi à Montréal
Hula hoop, charades, critiques sociales et alertes Amber étaient au rendez-vous pour le spectacle unique en son genre des interprètes et créateurs de contenu TwoSet Violon mardi soir dernier à la Salle Désilets.
Pour ceux et celles qui ne seraient pas déjà familiers avec TwoSet Violin, il s’agit d’un duo de violonistes australiens, mais tous deux originaires de Taïwan : Brett Yang et Eddy Chen.
Actifs depuis 2013 et cumulant depuis plus de 4 millions d’abonnés, les deux Youtubeurs publient régulièrement des vidéos humoristiques visant à vulgariser la musique classique pour un large public de non-initiés autant qu’à des musiciens professionnels.
Eux-mêmes ne sont pas étrangers à ce milieu : ils ont joué à plusieurs reprises aux côtés de l’Orchestre symphonique de Sidney, parfois comme solistes, alors que Yang aura également pu performer en 2014 lors du sommet du G20 à Brisbane, devant Barack Obama et Angela Merkel, notamment.
Mélange inégal entre humour et musique classique
Le spectacle de mardi était leur second passage en carrière à Montréal, dans le cadre d’une tournée internationale avec plusieurs dates en Europe, en Amérique du Nord et à Hong Kong. Accompagnés sur scène par la pianiste autrichienne Sophie Druml, collaboratrice régulière sur leur chaîne et favorite du public, Yang et Chen viennent présenter un concept audacieux mélangeant musique classique et sketches humoristiques, ainsi que d’absurdes concours de talent.
D’ores et déjà, disons-le, le spectacle peut s’avérer inégal et ne pas toujours répondre aux attentes professionnelles qui peuvent venir avec l’image traditionnellement associée aux concerts de musique classique. Si les animations et sketches semblent parfois sortir tout droit d’une édition régionale de Cégep en spectacle, elles rendent toutefois justice à l’univers bon enfant et moqueur du duo.
C’est d’ailleurs ce qui marquera d’entrée de jeu le début de la soirée, commençant en retard à cause de bagages disparus à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau qui générera quantité de blagues autant de la part des interprètes que du public. On aura ensuite droit à l’un des jeux les plus populaires chez les abonnés Youtube de TwoSet Violin : des charades musicales jouées à l’aide des violons et du piano, de même qu’une composition originale composée à partir de ces éléments. Le résultat est hautement satisfaisant et semble plaire aux néophytes de la musique classique.
Occupant plus de la seconde moitié du spectacle, le Ling Ling challenge (gag récurrent à propos du pianiste virtuose chinois Lang Lang) donne l’occasion au duo d’accomplir des tâches aussi inutilement complexes qu’astucieusement absurdes. Un concerto de Mendelssohn complet interprété en faisant tourner des hula hoop, un exercice rythmique avec les yeux bandés, une course poursuite où piano et violon changent constamment de mains, ainsi qu’une roue de fortune imposant sans préparation des pièces variées, allant de Mozart au redoutable Paganini. Tous des défis auxquels devront faire face les trois interprètes qui s’en tireront somme toute très bien. À ce concours de talent se joint également une critique des sanctions imposées par Youtube aux créateurs de contenu en musique, avec son système de copyright peu compréhensifs des enjeux liés aux interprètes de façon plus spécifique.
Une familiarité payante
Ce qui ressort surtout au final, c’est l’impressionnante relation de proximité entre les artistes et le public. Contrairement à un groupe de musique, suivi ou pas selon le rythme de sortie et la qualité de ses sorties, Brett et Eddy lancent du nouveau matériel plusieurs fois par semaine, rejoignant chaque fois des dizaines de milliers de personnes de partout dans le monde.
À force de les côtoyer numériquement, on arrive à les connaître mieux que n’importe quel autre artiste musical. Ce qui donne lui à quelques éclats : beaucoup de blagues fusent de part et d’autre, ralentissant souvent lourdement le rythme du spectacle. Un phénomène rarissime dans la planète classique, ou le décorum prend généralement toute la place. Les erreurs de jeu sont aussi plus facilement excusées lorsqu’elles surviennent, et les applaudissements s’éterniseront tout au long du spectacle.
C’est donc une rare expérience à laquelle auront eu droit les spectateurs et spectatrices de la Salle Désilets. On verra en effet rarement quelqu’un filmer l’intégralité d’un spectacle de l’OSM sur son téléphone. Yannick Nézet-Séguin aurait également été hors de lui en entendant retentir des alertes Amber sur la majorité des téléphones de l’audience au début du spectacle, mais ce sont de moindres accrocs dans la respectable quêtes que s’est donné TwoSet Violin : redorer l’image de la musique classique chez les plus jeunes, une blague à la fois, que ça choque ou non.
- Artiste(s)
- Twoset Violin
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Salle Désilets - Espace 7000
- Catégorie(s)
- Classique, Humour,
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