Orchestre Symphonique de Montréal

Saison 2019-2020 de l’Orchestre Symphonique de Montréal | La dernière de Maestro Nagano à la barre

La saison prochaine sera la 86e de l’OSM, et la 16e et ultime sous la direction musicale du chef d’orchestre Kent Nagano depuis son arrivée en 2004. Entre-temps, il aura dirigé quelque 600 concerts, démocratisé la musique classique pour la rendre accessible à tous, et fait résonner la réputation d’excellence de l’OSM à l’international. Alors, maestro Nagano, donnez-nous une seule bonne raison de partir?

« D’abord, répond-t-il, il est inhabituel pour un directeur musical de rester en poste aussi longtemps. Cela est dû à la relation privilégiée que j’ai encore avec les musiciens de l’OSM, et à la chimie entre l’orchestre et le public qui est restée toujours aussi dynamique. On m’a offert de continuer, mais je crois que quiconque aime la musique est sensible au phrasé. Dans une phrase, il y a un début, un sommet, puis une fin, pour pouvoir respirer. Le temps est venu pour moi de respirer, même si c’est profondément émouvant. »

Une ouverture et une clôture qui se complètent

Pour cette ultime saison de plus de 100 concerts sous sa signature artistique, Kent Nagano a voulu un concert d’ouverture et un concert de clôture qui se répondent et se complètent. Ainsi, en ouverture, il propose trois œuvres puissantes en hommage aux victimes de l’antisémitisme : la Symphonie no 13 de Chostakovitch, les Six pièces pour chœur d’hommes de Schoenberg, avec la célèbre basse russe Alexander Vinogradov, et la Rhapsodie sur un thème de Paganini du vénéré Rachmaninov.

Kent Nagano en conférence de presse, photo par Antoine Saito

Puis, l’intense Denis Matsuev interprétera le si beau Concerto no 3 de Beethoven dont on célébrera en 2020 le 250e anniversaire de naissance. Pour mémoire, ajoutons que l’OSM a enregistré sur disque l’intégrale des neuf symphonies du grand compositeur. « Malgré les histoires de guerres et de conflits dans le monde, il faut croire en l’humanité », pense Kent Nagano avec raison.

En clôture de saison, l’illustre chef a programmé des œuvres de ses compositeurs préférés en signe d’atteinte à une certaine sérénité, et porteuses d’espoir. Il s’agit du touchant Requiem de Fauré, et de deux pièces d’Olivier Messiaen. Mais l’apothéose, la cérémonie des adieux, consistera en la Symphonie no 2 dite Résurrection de Gustav Mahler, avec la soprano Camilla Tilling, et la mezzo Mihoko Fujimura qui avait participé à l’inauguration de notre Maison symphonique en 2011.

Des grandes œuvres tout au long de la saison…

Tout au long de la prochaine saison, le maestro ramènera des grandes œuvres qui ont marqué le répertoire de l’aOSM sous sa gouverne. Ainsi, nous pourrons apprécier la fameuse Symphonie no 5 de Malher, dont le mélancolique Adagietto se retrouve dans le film culte Mort à Venise de Luchino Visconti. Aussi, la Symphonie no 4 dite Romantique de Bruckner, aussi bien que l’Oratorio de Noël de Bach seront présentés.

Février 2020 sera l’occasion d’un concert tout à fait exceptionnel, fruit de la collaboration entre cinq grands partenaires, dont le Théâtre de la Monnaie à Bruxelles et l’Orchestre de la Suisse romande. Présentée en première nord-américaine, l’œuvre du compositeur français Pascal Dusapin sera suivie de la bucolique 6e Symphonie dite Pastorale de Beethoven, programme qui sera ensuite donné en grandes pompes à Toronto. Juste avant, Kent Nagano dirigera le Festival Schubert, une première dans l’histoire de l’OSM. L’intégrale des symphonies du compositeur viennois sera offerte, de même qu’une sélection de lieder dont il a été un maître incontesté. Angela Hewitt fait partie des belles voix qui l’affirmeront.

Au printemps 2020, ce sera au tour de l’Espagne d’être à l’honneur avec le réputé chef espagnol Juanjo Mena qui dirigera trois concerts. Une plongée au cœur du flamenco et de la musique arabo-andalouse. Ravel, avec son inépuisable Boléro, de même que les compositeurs De Falla, Sor et Rodrigo sont au programme. Des danseurs de flamenco de la réputée compagnie d’Antonio Marquez se joindront à l’orchestre.

Des invités prestigieux au programme

Des invités prestigieux, à la renommée internationale, jalonneront toute la saison pour le plus grand plaisir des mélomanes. La prodigieuse violoniste Anne-Sophie Mutter avec Beethoven, le pianiste Denis Matsuev avec Scriabine, le chef François-Xavier Roth dirigeant Strauss, le pianiste français Pierre-Laurent Aimard jouant Bartok, le fabuleux pianiste russe Emanuel Ax, le baryton Gerald Finley, le pianiste russe Daniil Trifonov, et le pianiste québécois Marc-André Hamelin jouant Liszt, tous seront chez nous pour célébrer avec faste la musique.

Il y aura aussi le chef russe Valery Gergiev qui dirigera la monumentale Symphonie no 9 de Bruckner, le violoniste grec d’exception Leonidas Kavakos, le chef Vasily Petrenko dirigeant Roméo et Juliette de Prokofiev, le violoniste virtuose Gil Shaham jouant Bartok, l’adulée soprano Patricia Petibon qui se joindra pour la première fois à l’OSM pour le cycle sensuel des mélodies Shéhérazade de Ravel.

Kent Nagano en conférence de presse, photo par Antoine Saito

Mais l’OSM sort aussi, et amorcera dès octobre 2019 une grande tournée de sept concerts en Amérique latine, faisant au retour un arrêt au Symphony Centre de Chicago, puis à Toronto. Et, poursuivant la tradition, pour une 45e fois l’orchestre foulera la prestigieuse scène du Carnegie Hall de New York le 24 mars 2020 avec du Schumann et du Chostakovitch.

Kent Nagano, l’humaniste qui démocratise la musique classique

Fidèle à sa mission éducative, que Kent Nagano en humaniste n’a jamais cessé de développer avec des programmes destinés à initier tôt les jeunes à la musique classique, l’OSM avec sa série familiale Jeux d’enfants proposera une production de la Philharmonie de Paris, ainsi que son programme La musique aux enfants commencé à Montréal-Nord. De même, les groupes scolaires sont invités à 13 Matinées jeunesse, conçues spécialement pour les niveaux primaire et secondaire, et dont l’ambassadeur est le comédien Patrice Bélanger. Par ailleurs, l’OSM a vu augmenter de 20% les abonnements de saison chez les moins de 35 ans.

C’est tout cela qui fait la force de l’Orchestre symphonique de Montréal, ayant su agrandir son spectre populaire avec aussi bien des concerts dans le Grand Nord du Québec, au pied du Mont-Royal, au Centre Bell ou sur l’Esplanade du Stade olympique, avec sa Virée classique dans les parcs, ses soirées à thème comme avec le conteur et chanteur Fred Pellerin, ou des présences rares et inattendues comme celle de Diane Dufresne. Même que, dans le cadre de la Nuit blanche du 29 février 2020, l’OSM proposera Orgue’n’roll où un trio explosif d’orgue, de batterie et de guitare électrique revisitera dans l’enceinte sacrée de la Maison symphonique la musique des années 70 de Pink Floyd à Frank Zappa en passant par Genesis.

Enfin, comme se le permet avec succès le Musée des beaux-arts de Montréal en recoupant d’autres plateformes artistiques, l’OSM nous réserve deux représentations uniques intitulées Musique, mode et mouvement, où la créatrice de mode Marie Saint Pierre et Kent Nagano ont concocté un concert éclaté auquel se verra ajouter la présence de modèles et de danseurs sur scène.

Kent Nagano en conférence de presse, photo par Antoine Saito

Bien que fondé en 1934, avec le grand pianiste Wilfrid Pelletier comme premier directeur artistique, bien qu’ayant réalisé une centaine d’enregistrements sur disque et reçu une cinquantaine de prix nationaux et internationaux, l’OSM ne cesse de rajeunir. L’arrivée en fonction à 24 ans du Québécois Thomas Le Duc-Moreau à titre de chef assistant en est une démonstration éloquente. L’OSM a apporté pas moins de 62 nouvelles œuvres à son riche répertoire sous le règne de Kent Nagano.

« Nous avons voulu créé un orchestre du 21e siècle, rappelle son directeur musical. Le public a radicalement changé, pour devenir le plus jeune de tous les orchestres d’Amérique du Nord. Le voyage musical que nous ferons ensemble la saison prochaine est conçu de façon à ce que l’on termine sur une note d’espoir et de résurrection. »

Qu’est-ce que maestro Nagano retiendra principalement de son long et fructueux séjour à Montréal? « Deux grandes choses, s’empresse-t-il de répondre. D’abord, la qualité exceptionnelle des musiciens de l’orchestre. Et ensuite, le fait que l’OSM ait été en constante évolution pour devenir un des meilleurs orchestres au monde. Ceux qui nous ont apporté leur support durant les années 80 et 90 voient arriver une toute nouvelle génération aussi passionnée qu’eux par le pouvoir incroyable qu’exerce dans nos vies la musique. »

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