Philippe-Audrey Larrue-St-Jacques au Gesù | Le Camus de la blague
Rares sont les soirées humoristiques qui nous accueillent avec un quatuor à cordes digne des plus belles salles de bal du Titanic. Mais là encore, rares sont les Philippe-Audrey Larrue-St-Jacques.
Les lumières du lobby clignotent au son des dernières notes du quatuor, signe qu’il est temps de se diriger vers la salle et de prendre siège.
Paradoxalement, ce clignotement de lumières, s’il est ici une convention du monde ô donc civilisé du théâtre, sera, sous une autre forme, au coeur de ce que reproche Philippe-Audrey à la culture populaire.
« Vous comprendrez que ça flashait pas beaucoup les lumières chez nous » dit-il d’emblée, en expliquant qu’il avait grandi aux côtés de poètes et universitaires qui ne donnaient pas cher de la peau de Jean-Marc Parent, mettons.
Mais même si exprimées avec un snobisme et un dédain exagéré, ces pointes lancées en direction du petit peuple, on les devine empreintes d’une certaine jalousie.
C’est ce qu’on comprendra à travers cette première oeuvre: oui, l’artiste est lettré, cultivé, « au-dessus » de la masse commune, mais grand Dieu qu’il aimerait être capable d’appartenir à cette même masse. Tout se joue donc autour de l’incapacité de l’humoriste à connecter avec les autres, à comprendre les codes de la civilisation moderne, lui qui serait plus à son aise dans un salon parisien du 18e siècle que dans n’importe quel bar du Mile-End.
Mais bref, avant de décortiquer la soirée, commençons par le plus important : l’habit.
Parce qu’il ne fait peut-être pas toujours le moine, mais sachant à quel point monsieur Larrue-St-Jacques est aficionado de haute-couture, on peut s’imaginer qu’il a longuement été réfléchi et mérite donc qu’on le souligne.
Après tout, pour bien comprendre l’homme et son oeuvre, il faut analyser chaque détail et le voir dans tout ce qu’il a de plus obsessif.
Fait que. Souliers longs, d’un cuir qu’on devine italien (connaissant son amour de la patrie des Ducati). Veston de suède à queue-de-pie, parce que c’est pas Woodstock en Beauce, icitte. Pantalon taille-haute à la coupe parfaite.
Quiconque a déjà écouté Deux Princes, le podcast que partage l’humoriste avec Thomas Levac (présent dans la salle d’ailleurs, et dont le rire, disons, reconnaissable, sera audible pendant la soirée) ne s’attendait à rien de moins comme look.
Parlant de podcast, c’est fou la proximité que ce médium nous permet d’avoir avec les gens qui les animent. D’ailleurs, d’être auditeur de Deux Princes permettait clairement d’avoir une longueur d’avance sur les autres spectateurs, parce que déjà au courant de certains insides et de certaines prémisses.
En même temps, ça rend aussi les gags plus prévisibles. Double-tranchante, cette épée.
Mais si certains gags sont justement prévisibles, ou même un peu surfaits (les jokes de Kéveune, on commence à avoir fait le tour), l’humoriste réussit à, au moins, les rendre avec une verve qui les renouvelle. Parce qu’une joke niaiseuse, c’est correct, mais une joke niaiseuse dans un français Laroussien, ça surprend un peu plus.
Ce qui surprend encore plus, c’est la finale du spectacle. On ne vous la divulgâchera pas, mais c’est ce moment du spectacle qui cimente la place qu’est en train de se tailler Philippe-Audrey sur la douane entre l’humour et le théâtre. Entre la connerie et la finesse.
Entre le siècle dans lequel il est né et celui duquel il est le véritable enfant.
- Artiste(s)
- Philippe-Audrey Larrue St-Jacques
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Gesù
- Catégorie(s)
- Humour,
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