Pearl au Théâtre Impérial | Une perle rare

Le mot Pearl du titre du spectacle ne vient pas des huîtres perlières des rives de l’océan Indien, mais plutôt du nom de Pearl S. Buck, lauréate du Nobel en littérature et d’un Pulitzer, auteure reconnue mondialement pour La terre chinoise. Cette production de danse-théâtre canado-sino-américaine, inspirée de la vie de l’auteure, qui a connu le succès à Broadway l’été dernier, vient d’amorcer sa tournée nord-américaine à Montréal où elle est présentée jusqu’au 18 juin seulement au Théâtre Impérial.

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Crédit photos: Chris Nicodemo

Il faut donc se dépêcher, car Pearl regorge de moments qui sont comme une douce pluie fine tombant dans le for intérieur de chacun et nous réconcilie avec le monde.

La compagnie compte 26 danseurs (chinois, américains et canadiens confondus), dont sept Canadiens, soit cinq de Montréal, incluant Margie Gillis en 5e Pearl, et deux de Toronto, dont Claudia Marjanovic qui personnifie la 2e Pearl.

 

De la littérature à la scène

Pearl S. Buck est née en 1892 en Virginie-Occidentale. Mais elle a grandi principalement en Chine où ses parents étaient des missionnaires qui vivaient rapprochés des paysans chinois plutôt que dans le camp des missionnaires. Après l’obtention d’un diplôme collégial en Virginie, elle est retournée en Chine, un peuple pour qui elle nourrissait une affection très particulière.

Elle a commencé à écrire en 1920, mais son premier roman paru en français remonte à 1930 sous le titre Vent d’Est, Vent d’Ouest, dont le sujet – les nouveaux rapports entre l’Orient et l’Occident – lui méritera un succès instantané, répété l’année suivante avec La Terre chinoise qui lui valut le Pulitzer. Elle a écrit une soixantaine d’ouvrages pour lesquels elle s’est méritée le Nobel en 1938.

Tous s’entendent pour dire que l’œuvre de Pearl S. Buck dépasse largement sa dimension littéraire, faisant avancer la difficile approche entre la Chine et les États-Unis à cette époque. Elle aura donc joué un rôle très actif dans de nombreuses organisations humanitaires, et aura été la première à fonder une agence internationale pour l’adoption d’enfants de mères asiatiques et de pères américains. Elle a été, le moins que l’on puisse dire, une visionnaire humaniste universelle.

Crédit photos: Chris Nicodemo

Crédit photos: Chris Nicodemo

Il n’était vraiment pas facile d’adapter pour la scène la vie et l’œuvre de cette héroïne morte en 1973. C’est le metteur en scène, chorégraphe et danseur Daniel Ezralow (il a dansé pour Lar Lubovitch, Pilobolus et Paul Taylor) qui s’est attaché à la lourde tâche, entre Love au Cirque du Soleil, les Jeux olympiques de Sotchi ou encore Spider-Man à Broadway.

Ezralow a même poussé l’audace jusqu’à demander une trame musicale originale au grand compositeur Jun Miyake, renommé pour ses collaborations avec Pina Bausch, Bob Wilson, David Byrne ou Oliver Stone. Quant au décor, tout en désir, en volupté et en plaisir, il a été conçu par Michael Cotten qui doit sa réputation d’abord à son talent, mais aussi à son travail original avec Michael Jackson ou même Bette Midler.

Avec le résultat que le spectacle Pearl nous en met plein la vue, au détriment parfois de l’émotion retenue par les danseurs chinois, comme si cela était dans leur nature.

Crédit photos: Chris Nicodemo

Crédit photos: Chris Nicodemo

5 étapes

Les messages d’espoir, de compréhension, de force nouvelle, sont habilement transmis en cinq étapes symboliques : Printemps, Rivière, Fleur, Lune et Nuit, en concordance avec un très ancien et hautement vénéré poème chinois de Zhang Rioxu intitulé Nuit de lune et de fleurs sur le fleuve printanier. Un très beau poème, que les producteurs auraient dû ajouter dans le programme, contenant la fine fleur et un filet d’eau tout chinois, avec des vers comme : « Le fleuve coule, avec les eaux, s’écoule le temps » ou encore : « En tombant la lune touche les arbres du long fleuve ».

Le long fleuve est sans nul doute le Yangtze. Les danseurs de Pearl s’exécutent d’ailleurs dans et autour d’une rivière mouvante, représentant le fleuve sacré. Cinq danseuses d’âges variés illustrent en cinq étapes la vie et l’œuvre de Pearl S. Buck.

Parmi elles, on retrouve avec bonheur Margie Gillis, qui défie son âge, en dégageant la souplesse et la fluidité dans ses mouvements comme dans ses expressions faciales qui ont fait sa renommée à l’international.

Il ne faut jamais oublier qu’aussi tôt qu’en 1979, Margie Gillis a été invitée à enseigner et à donner des conférences en Chine, faisant d’elle la première Occidentale à introduire des éléments de la danse moderne dans ce pays qui ne savait pas encore s’il avait réussi sa révolution culturelle.

Après Montréal, Pearl se déplacera à Toronto, puis à Chicago, et peut-être à Vancouver. La liste risque de s’allonger devant cette grande réussite d’un spectacle qu’il faudrait bien aller présenter aussi en Chine.

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