Osheaga

Osheaga 2018 | Premier jour festif avec Odesza, Portugal. The Man et plus

Le retard de Travis Scott, les confettis d’Odesza ou encore l’énergie de Portugal. The Man, voilà qui résument en partie cette première journée d’Osheaga, festival devenu un incontournable l’été à Montréal. Son coup d’envoi donné hier l’aura encore une nouvelle fois démontré.


 

Et pour profiter comme il se doit de l’événement, quoi de mieux que d’arriver assez tôt en comptant sur un aménagement parfait pour ne pas perdre son temps. Or, en prévision du nouvel espace prévu pour 2019, l’Osheaga temporairement installé sur l’Ile Notre-Dame est mal conçu. Pourquoi ? Dans une disposition inévitablement longiligne, les indications sont souvent mauvaises, l’accessibilité est parfois douteuse et les distances sont évidemment énormes au regard de l’immensité du circuit Jacques-Villeneuve. À l’évidence, s’armer de patience pour déambuler est un mal nécessaire tout comme celui de se doter d’une montre extrêmement précise pour ne pas manquer un concert.

 

Un Disque d’Or pour Matt Holubowski

Les problèmes organisationnels passés, c’est au son d’une basse imposante que les premiers festivaliers se rendent sur l’immense scène de la Rivière. Le groupe californien Sir Sly et son chanteur Landon Jacobs se démènent sur fond de dessins animés tandis que joue un rock alternatif diablement efficace bien que linéaire. Un horaire idéal toutefois pour ce groupe américain qui joua devant un public étonnement nombreux à ce moment de la journée.

Puis, en face, un contraste détonnant s’opère lorsque des instruments à cordes frottées se font entendre. Un public plus parsemé s’amène devant la scène de la Montagne pour voir Matt Holubowski habillé de circonstances avec sa chemise à fleurs. Dans une setlist sûrement trop douce pour captiver un public nouveau, le natif de Hudson aura malgré cela prouvé que son jeu de guitare associé à sa voix si particulière ne sont pas étranger au succès de Solitudes, album devenu Disque d’Or avec plus de 40 000 copies écoulées!

Des concerts sous une chaleur écrasante

Dès lors, les spectacles se poursuivent et la surface asphaltée du site fait vaciller quelques festivaliers déjà bien alcoolisés. Sous une chaleur écrasante, les colliers à fleurs et autres chests bien musclés transitent entre les deux plus grandes scènes du site avec d’un bord le groupe indie Rainbow Kitten Surprise qui offre un condensé hip-hop/soul/rock bien maîtrisé mais sans grosses surprises à l’inverse de Manchester Orchestra. Le groupe originaire d’Atlanta surprend par des sonorités plus lourdes d’un rock qui contraste fortement avec des versions studio plus aseptisées.

Dans un marathon-concerts chargé, l’heure est déjà au changement de lieu : direction la scène de la Vallée qui fait traverser le festivalier dans les dédales du parc qui offre enfin un peu de fraîcheur. En prenant de la hauteur sur la grande roue, difficile de manquer cette hérésie d’une douce Julien Baker encerclée par les bruyants Walker & Royce et BAZZI qui jouent en même instant à quelques encablures. Difficile de l’entendre mais aussi de comprendre comment programmer cette artiste folk à ce moment précis.

 

Une fin d’après-midi festive 

Tandis que la nappe de nuages s’écarte pour laisser passer les rayons de soleil, un artiste en procure inévitablement sur fond d’immenses abricots affichés à l’écran géant. Ambiance estivale assurée car sur la scène de la Vallée, Rex Orange County captive la foule avec aisance du haut de ses 20 ans (!). Soutenu par une indie pop rythmée, efficace mais surtout sincère, le chanteur et guitariste anglais transmet un enthousiasme contagieux à l’inverse de l’intriguante St. Vincent sur la scène de la Rivière. Le public assiste là, dans une toute autre registre, à un exercice extrêmement réussi alliant précision musicale et esthétisme visuel. Pas le temps de danser, la nombreuse foule s’invite progressivement dans l’univers étrange d’Annie Clark. L’Américaine aurait mérité un horaire plus tardif pour mettre davantage en valeur cette expérience visuelle hors du commun.

Parlant d’horaire, celui de Portugal. The Man était parfait. Après un discours du chef Mohawk pour leur habituelle tribune octroyée aux Premières Nations, une reprise d’Another Brick In The Wall résonne avant que les succès du groupe s’enchaînent. Prévenus sur l’écran géant dans une autodérision subtile, les Alaskains sont peu bavards mais s’affirment tout de même comme un bon live band grâce à un visuel étrange et une musique festive. Malgré un équilibre du son médiocre, le public s’est éclaté sur le succès planétaire Feel It Still comme les titres de l’album Evil Friends. Un public qui enchaîna d’ailleurs probablement en face avec les énergiques Yeah Yeah Yeahs, emmenés par une Karen O surexcitée et heureuse d’être de retour à Osheaga après neuf années d’absence.

 

Odesza en met plein la vue, Travis Scott arrive en retard

Spectacle très attendu de la soirée, Odesza est réputé pour déployer l’artillerie lourde et le duo de Seattle n’aura aucunement déçu. D’emblée, le travail vidéo est sidérant et le sera tout le long du spectacle. Transportant le festivalier dans un vaisseau spatial dont la seule sortie est cet hexagone incrusté au plafond de la scène de la Montagne, le public ébahit embarque finalement dans un cosmos avant que des artifices s’invitent durant une grosse heure. Entre pyrotechnie, confettis, lasers et jets de flamme, Osheaga se métamorphose et là où l’on pourrait croire que les DJ Harrison Mills et Clayton Knight se laisseraient submerger par le visuel, la musique se fait une place de choix avec des performances de cuivres, de percussionnistes mais aussi de la chanteuse Noami Wild qui accompagne le duo sur Higher Ground. Et dire qu’à ce moment là, les festivaliers ne supposaient pas que Travis Scott serait coincé aux douanes canadiennes…

Les informations tombent ainsi au compte-gouttes et le rappeur arrivera finalement avec plus d’une heure de retard sur scène pour un concert de 40 minutes qui aura sûrement frustré de nombreux festivaliers, même si la foule a majoritairement attendu l’arrivée de l’artiste avec patience et calme. Pour notre part, au lieu d’être illusionné par un artiste qui ne maîtrise pas son calendrier — ni les aléas des douanes canadiennes! — rivons les yeux et les oreilles vers la scène Verte où s’est installé, à l’heure, James Blake derrière ses trois synthétiseurs. Le chanteur anglais a inévitablement séduit. Dans une ambiance douce, sa musique parfois complexe résonne toujours sous l’emprise la poésie d’une voix légère dont il a le secret et qui se manifeste au gré des expérimentations de ses deux acolytes musiciens.

Un moment solennel que le festival vivra probablement les deux jours prochains.

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