Montréal Complètement Cirque | Face Nord à la Gare Dalhousie
Montréal Complètement Cirque a pris d’assaut la ville depuis mercredi soir ; vendredi, les gars de Face Nord nous ont bourré le crâne de sensibilité masculine.
À la Gare Dalhousie, les spectateurs sont juchés sur des estrades, des quatre côtés du carré de tatamis au centre de la pièce. Les quatre artistes d’Un loup pour l’homme font leur entrée deux par deux, par les extrémités, et deux d’entre eux portent des protections à la tête, genre casque de boxe et pièces pectorales de hockey. Ils s’avancent l’un vers l’autre. Se font une accolade, puis se jettent l’un sur l’autre, avant de s’immobiliser. Et de recommencer. Coups d’épaules, comme chorégraphiés, câlins. Et encore.
Après, le premier s’élance en plongeon horizontal, comme pour s’envoler, et le deuxième l’attrape au parcours. Reprises. Puis, le troisième, sans mot dire, vient se coucher au centre du tatamis, la tête sur un coussin carré rouge, dresse ses pattes pour faire faire l’avion aux deux premiers, mais alors qu’ils s’élancent, à l’atterrissage, le porteur les projette de côté, avec vigueur. Et ils recommencent.
Un moment donné, ils changent de jeu.
Tantôt c’est du saute-mouton. Tantôt c’est une pyramide humaine. Tantôt c’est une tague à l’aveugle ou un jeu d’équilibre. Tantôt c’est une tour. Tantôt c’est une roue qui s’enfonce dans le sol.
Pendant cinquante minutes, ils jouent. Des jeux de gamins avec une adresse d’hommes. Ils se courent après, se lancent les uns sur les autres, s’escaladent, s’aident, se grimpent dessus, se taquinent, se secouent, s’empoignent, se soutiennent, se bousculent, s’emmêlent, se couchent, se tiraillent, se poursuivent, s’agrippent, s’écrasent, se piétinent, s’embrassent, tournent, marchent, zigzaguent, tombent, recommencent, volent, glissent l’un sur l’autre ou même l’un sous l’autre.
Pendant cinquante minutes, on se dit : ces gars-là, faut qu’ils s’aiment en mautadine pour se frotter l’un à l’autre de la sorte. Ils sont concentrés, sérieux, impassibles, magnifiques. Ils s’aiment, c’est visible, palpable, d’un amour viril, avec force et fermeté, mais avec une infinie tendresse.
Pendant cinquante minutes, parfois sur mélodies baroques ou chants lyriques, la plupart du temps dans le silence le plus complet, Un loup pour l’homme présente une multitude de corps à corps touchants. Poignants, comiques, loufoques à l’occasion, les acrobates demeurent imperturbables pour toute la durée de la représentation. Pas un clin d’œil, une émotion, un commencement de sourire : leur expression faciale demeure figée, tour de force parmi tous ceux qu’ils nous auront présentés.
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