crédit photo: Jay Kearney

Festif! 2022 | Baie-St-Paul, ville ouverte

Fier natif de Charlevoix et résident de Baie-St-Paul pendant 7 ans, j’ai encore un gros PTSD à voir les vacanciers débarquer dans la région chaque année dans leur gigantesque flotte de communautos hybrides. Jusqu’à récemment, la ville était uniquement assaillie d’Européens sexagénaires qui se ruaient sur la rue Saint-Jean-Baptise pour acheter la même cr**s de reproduction de Clarence Gagnon dans l’une des 3645 galeries d’art identiques. Va sans dire qu’après quelques étés, on développe une certaine relation amour/haine avec le tourisme. D’un côté, c’est l’économie principale de la ville. De l’autre… Ça gosse en ta’.

Alors qu’on apercevait la lignée d’autos qui s’étendait à perte de vue, du parvis de l’Église de Baie-St-Paul jusqu’à la basilique de Saint-Anne de Beaupré, il n’y avait point de doute hier : le Festif! était bel et bien lancé!

Par contre, une fois le choc du trafic passé, vient un grand sentiment de fierté de voir la capitale culturelle se remplir et se rajeunir l’espace d’un weekend. Désignés autrefois comme des « touristes indésirables » par un certain conseiller municipal qui souhaitait déplacer les installations du Festif! ailleurs qu’au centre-ville, les nombreux festivaliers qui déferlaient sur le site à l’ouverture confirment que Baie-St-Paul, grâce au travail acharné de Clément Turgeon et son équipe, est FINALEMENT sur la map! (Lâchez-moi avec vos histoires de Cirque du Soleil)

* Photo par Jay Kearney.

 

Bref, le Festif!, évènement estival désormais incontournable, débutait hier sa 13ième édition. Avec ses 90 artistes répartis sur 25 scènes durant 4 jours, l’offre étaient déjà considérable pour le premier soir.

Difficile de se savoir où se garrocher, impossible de se faire un horaire clair.

Hail mary qu’y disent, je me suis rendu sur le parvis de l’Église, j’ai acheté des chouennes, une monnaie locale qu’un ami du secondaire m’a décrit, non sans mauvaise foi, comme « de l’argent que tu peux utiliser nulle part » (pour un portrait plus fidèle de ce super concept, voir ici), j’ai downloadé l’application du Festif! et j’ai opté pour la stratégie « tapas » en me disant que j’allais goûter un peu à toute, sans trop me poser de question.

Édith Butler a ouvert le bal de façon spectaculaire. À peine arrivée sur scène, elle a agité des signes de devil 🤘🏻 devant la foule, la bouche pleine de sang et s’est lancée dans un cover assez décoiffant de Burzum, mythique one-man band de black métal norvégien…. Du moins, c’est ce qu’on m’a raconté, n’ayant pu me rendre au spectacle à temps pour le constater moi-même.

* Photo plus réaliste de la vraie Edith Butler. Crédit : Caroline Perron.

 

Arrivé à l’heure pour Pierre Kwanders, par contre, les yeux pétillants, remplis d’espoir pour un gros jeudi soir.

L’artiste afro-canadien avait deux grandes missions :

  1. éloigner les nuages gris qui flottaient au-dessus de nos têtes comme de nombreuses épées de Damoclès et
  2. réchauffer la foule pour la grosse soirée d’ouverture.

* Photo par Jay Kearney.

 

À prime abord, le contrat s’annonçait rempli, grâce à son charisme et sa vibe suavé, les gens se déhanchaient allègrement, tout en se saluant les uns les autres dans ce « festival du degré de séparation » où tout le monde semblait connaître tout le monde pour la simple et bonne raison que littéralement tout le monde était là.

De Philippe Fehmiu (que serait un Festif! sans lui) à Marie-Hélène Thibault, en passant par Arnaud Soly, Monic Néron (la star de Charlevoix), ton cousin, ton ancien collègue d’université et ton coach de gym que t’as vu deux fois c’t’année parce que t’as encore choké ta résolution. Tout. Le. Monde. Était. Là.

Pourtant, à l’arrivé de Bran Van 3000, le courant ne semblait pas passer allègrement entre la gigantesque foule et l’octuor (ou le nonette, c’est pas clair). James Di Salvio et ses collègues se donnaient à fond pour créer un moment, une vague, quelque chose, ramant à travers un setlist assez similaire à celui du festival de Jazz, mais version courte…

Malheureusement, tout ça passait 6 pieds par-dessus la tête de bien des gens, à l’instar des nuages qui nous menaçaient davantage. L’absence de Stephane Moraille se faisait définitivement sentir, mais comme la plupart des festivaliers n’avaient pas encore terminé de saluer toutes leurs connaissances, j’aurais tendance à blâmer leur manque d’écoute sur leur sociabilité. (TOUT LE MONDE. ÉTAIT LÀ.)

* Photo par Jay Kearney.

 

Une fois le deuxième spectacle de la scène Desjardins terminé, le ciel, contrairement au public, s’est déchaîné et la pluie s’est mise à tomber, emportant dans le déluge les prestations de Polo & Pan, CRi, Lydia Képinski, SUUNS et The Halluci Nation.

Les milliers de spectateurs durent quitter le site pour se réfugier un peu partout, sous des chapiteaux, des tables à pique-nique ou des chaises tenues à bout de bras.

Pour ma part, détrempé de la tête aux pieds, j’ai trouvé abri sous la tente de SABSA/MIELS/Vision d’espoir de sobriété, qui ont mis sur pied un paquet de chouettes services pour les festivaliers (condoms, tests de dépistage de GHB/fentanyl, infirmières disponibles sur places pour traiter les intoxications, etc.). Mes hommages à toute la bande.

Après une heure d’averses, alors que les annulations s’accumulaient, le Festif! a repris ses opérations en présentant un spectacle de Mattiel au garage du curé Exclaim devant une petite foule de guerriers.

Je suis resté un moment, séduit par le ton très « Siouxsie Sioux » de la chanteuse originaire d’Atlanta… Puis la pluie a recommencé doucement et j’ai abandonné en me disant que j’allais mettre les bouchées doubles demain pour pallier à ce coït interrompu.

J’ai commandé une poutine dans une cantine pas très loin et l’ai mangé en marchant seul dans la nuit.

Soudainement, il n’y avait plus beaucoup de monde à Baie-St-Paul… Et c’était bien dommage.

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