Entrevue Chocolat | Tss Tss : DIY, mais tout sauf puriste
Chocolat est de retour ! Ce soir, à la Vitrola, le groupe mené de front par Jimmy Hunt remontera sur scène pour présenter les nouvelles chansons de Tss Tss, courte mais tripative galette de rock psyché-garage disponible depuis quelques jours. Sors-tu.ca a rencontré Jimmy et son acolyte Emmanuel Ethier, seul nouveau-venu au sein de la formation.
Certains se rappeleront de ce EP en carton, paru en 2007 sous l’étiquette de Navet Confit à l’époque. Une collection de courtes chansons rock sauvages, rugueuses et insoumises. Puis, l’excellent Piano Élégant, un premier album complet, plus appliqué, Beatlesque et rockabilly, en 2008. L’un des meilleurs albums francophones québécois de cette décennie.
En tournée, les vilains garnements foutaient le trouble partout où ils passaient. Au sens propre comme au figuré…
Puis en 2010, le groupe a été mis en veilleuse et Jimmy Hunt s’est lancé dans une carrière solo afin de cultiver ses envies de chansons pop, avec deux albums acclamés par la critique. Pas plus tard qu’hier, Maladie L’amour était récompensé de deux Félix pour l’Album alternatif de l’année et l’Album de l’année – Choix de la critique, rien de moins.
Le retour de Chocolat
Depuis un petit bout de temps, dans les minuscules coulisses de la scène locale, on entendait les rumeurs d’un retour de Chocolat. Voilà qui est fait. « J’étais dû pour ça après deux albums solo, admet Hunt. C’est un bon break. C’est moins de pression sur une seule personne, et c’est le fun de jouer en band ».
Son acolyte en rajoute : « quand tu es dans un band, tout est démocratique. Ça permet un laisser-aller. »
Fidèle comparse de Hunt, mais aussi musicien et mixeur pour des artistes aussi variés que Cœur de Pirate, Kandle et Passwords, Emmanuel Ethier sait s’adapter à toutes les situations, et son ajout au sein du groupe original allait de soi, aux côtés d’Ysael Pépin, Brian Hildebrand et Martin Chouinard.
Au départ, Jimmy avait écrit quelques chansons qu’il imaginait bien parmi le répertoire de Chocolat. Ce qui devait être un 7″ (donc 2 ou 3 nouvelles chansons) pour permettre au groupe de jouer en spectacle à nouveau avec du matériel tout neuf, s’est transformé en album complet.
Enregistré au Studio Victo, l’album avait pour but, dès le départ, de sonner cru… et de donner du fil à retordre au mixage.
« Le but de l’album, c’est qu’il sonne un peu la marde », lance Emmanuel Ethier en éclatant de rire. Tous les musiciens jouaient en même temps dans une pièce en rond avec quelques micros dans le milieu. Sans casques d’écoute. Tout rentrait dans tout : le son des amplis, la voix de Jimmy dans un moniteur… Un « bain de sons », comme le décrit Jimmy. « Rendu au mix, il n’y avait pas vraiment de marge de manoeuvre, explique Ethier. On a mixé par e-mail en plus. D’ailleurs, c’est probablement l’album le plus tough que j’ai eu à dealer avec au niveau du mix, parce que c’était n’importe quoi l’enregistrement. »
iPad dans le tape
Pourquoi tant de contraintes ? Par purisme rock’n’roll ? Même pas. « Au départ, on s’était dit que ça allait être ça. On se fait chier, mais ça va être le fun », admet Emmanuel Ethier. « Fallait que ça reste minimal. Un peu Motown dans la prise de son », dit Jimmy. Un ‘Wall of Sound‘ avec bin de la distorsion… « Un wall of shit finalement ! »
DIY, oui, mais pas puriste vintage non plus : les gars n’ont pas hésité à tirer profit de la tablette électronique de Jimmy sur laquelle il avait enregistré les démos de pré-production. « Il y a beaucoup d’iPad dans l’album, souligne presque fièrement Emmanuel. Dès qu’il y avait un son de synthé ou un effet sur la voix que Jimmy avait choisi sur ses démos sur iPad, on prenait les mêmes sur l’album. Tout ça enregistré sur tape. C’est n’importe quoi. Il y avait un Hammond B3 à côté de nous autres, pis on utilisait le son qu’on avait sur iPad, dans les effets de base qui viennent avec Garageband. »
Jimmy en rajoute : « je les aimais, moi, les sons de Garageband. Les voix de chorus, c’est « dreamy » de Garageband. Sans changer les settings, tel quel. »
Le pont avec les albums passés
Le résultat est un genre d’ovni dans le paysage de la chanson québécoise : une trentaine de minutes de rock trippeux, psychédélique et parfois même prog-rock. Ça rappelle le premier EP de Chocolat un peu par moments, mais aussi du Sonic Youth, voire même du vieux Pink Floyd, à l’époque où le groupe britannique était mené par Syd Barrett. « C’est comme l’esprit Piper At The Gates of Dawn, mais fait sur un iPad. C’est d’ailleurs l’album qui vieillit le mieux de Pink Floyd ».
« Il y a certains tounes où on se casse un peu plus le bicycle, pour un band de garage entre guillemets. L’idée, c’était de prendre un groupe de garage et leur faire jouer des tounes qu’ils sont pas capables de jouer, avec des accords de jazz et des patterns pas possibles. Si c’était joué par des bons musiciens, ce serait plate. Ça donne une vibe. »
Avec ces huit pistes ajoutées au répertoire, Chocolat se dit prêt à ramener le matériel antérieur à l’avant-plan également. Peut-être davantage les chansons du EP que celles de Piano Élégant. « On s’est replongé dedans en les rejouant. Le fait de jouer avec Brian (Brian Hildebrand, le batteur), surtout pour les tounes du EP, ça fait plus de sens que toute la tournée de Piano Élégant où on les jouait et c’était pas ça. Là, on peut les rejouer comme du monde. C’était le bon drummer pour ces tounes-là. »
Les textes aussi sont très différents d’à l’époque, même s’il faut tendre l’oreille pour les saisir au sein de ce brouillard sonore. « Dans le temps de Chocolat, j’écrivais sur des histoires de sorties, de partys et des histoires avec des filles. Dans le temps, c’était ça ma vie. Mais moins maintenant, je suis passé à autre chose. Je tripe plus sur National Geographic, la science, l’apocalypse quand le soleil va devenir une red giant et englober la Terre… » Il y a un peu de ça, mais aussi une certaine dose d’humour, d’étrangeté et d’obscénité, notamment sur Méfiez-vous du Boogaloo.
Le temps est donc venu de retrouver Chocolat sur scène. Contrairement à ce que certains seraient tentés de croire, le lancement-concert à la Vitrola ne sera pas leur premier concert depuis la réunion du groupe… Ils ont déjà un show dans la corps, puisqu’ils ouvert pour les Black Lips au Club Soda, le 27 septembre dernier presque incognito…
Des dates de spectacle sont prévues un peu partout au Québec, jusqu’en avril 2015.
- Artiste(s)
- Chocolat, Jimmy Hunt
- Ville(s)
- Montréal
- Catégorie(s)
- Indie Rock, Rock,
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