Thomas Dutronc

Entrevue avec Thomas Dutronc

De guitariste jazz manouche à chanteur pop, il n’y avait qu’un pas pour Thomas Dutronc. Et pourtant, l’artiste parisien n’avait pas l’intention de se contenter d’une enjambée…

 

Photo par Yann Orhan

Faut-il souligner l’évidence; le legs parental de papa Jacques et maman Françoise Hardy tend à croire que le fils Thomas n’aurait pas pu finir boulanger, comptable ou astronaute.

Pourtant, le chemin de carrière ne paraissait pas si évident pour Thomas Dutronc.

D’abord, il a fallu attendre le début de la trentaine avant de s’assumer chansonnier, un peu par défaut d’ailleurs. « Moi, c’est la guitare qui m’intéressait », explique-t-il au bout du fil. Passionné de Django et nourri par le grand Biréli Lagrène (qu’il a d’ailleurs côtoyé), Thomas Dutronc se faisait aller les doigts pour trouver sa voix. « J’essayais de trouver mon originalité. J’avais besoin de faire ma route, de bien apprendre la musique. En tant que ‘fils de’, je voulais une certaine légitimité, confie-t-il. On doit se donner du mal quand on a autant de chance ».

 

De la guitare à la chanson

« J’en ai rencontré des virtuoses. J’ai compris avec le temps qu’il fallait trouver sa voix, son son, arrêter de copier les maîtres ». C’est ainsi que Thomas Dutronc, alors strictement guitariste, s’est retrouvé entouré d’amis à fignoler tout naturellement ce qui allait devenir l’ébauche d’un spectacle.

« Je passais des soirées avec des amis manouches et corses. On jouait de la guitare, on délirait sur la chanson des frites (NDLR: Les Frites bordel), on s’arrêtait, on mangeait des saucissons en écoutant Django. Ça nous donnait des belles soirées où il y avait beaucoup d’humour et d’ambiance ».

Thomas Dutronc a alors eu l’idée de monter un spectacle qui allait reproduire cette énergie sur scène. « C’était plus dynamique que les concerts de virtuoses avec 3 chaises et un rideau, qui ne s’adresse qu’à un public d’habitués ».

 

Silence, on tourne…

C’est l’ami Mathieu Chédid, alias -M-, qui allait convaincre Thomas de préparer un CD, l’outil nécessaire pour partir en tournée. Il fallait donc construire des chansons, que d’autres chantaient au départ, mais progressivement, le jeune guitariste s’est mis à endosser le rôle de chanteur afin de faciliter les possibilités de tournée.

La pochette de "Silence on tourne, on tourne en rond" de Thomas Dutronc

Après avoir connu le succès en France avec un premier album tardif – Comme un manouche sans guitare, en 2007, qui lui a valu un prix Victoire – l’artiste parisien rappliquait cet automne avec Silence on tourne, on tourne en rond, une deuxième bordée de chansons qui embrasse à la fois l’héritage chansonnier de ses géniteurs et une fascination pour le septième art.

Maintenant pleinement assumé, le chanteur s’amuse ferme avec les mots, une matière qu’il n’avait pas la chance d’exploiter lors de ses années de guitariste jazz manouche. Sur Silence on tourne, Thomas Dutronc exploite divers thèmes légers et universels, dont notre dépendance à la technologie sur On ne sait plus s’ennuyer. « Moi-même, je me sens accro du mail, je me sens perdu lorsque je n’y ai plus accès. On communique de plus en plus sans rien dire. On multiplie les discussions sans aller au bout de rien », laisse-t-il entendre. C’est à partir de cette idée qu’il a décidé de rassembler une série de jeux de mots employant le lexique informatique pour illustrer son propos.

Le cinéma est également à l’honneur, avec un regard surprenant de gamin sur les clichés du septième art, sur Clint (Silence on tourne). Cette pièce s’inspirait d’une mélodie à la James Bond qui avait pris le contrôle des doigts du guitariste. Thomas Dutronc revisite également son adolescence sur Sac ado, et saupoudre l’album de quelques pièces instrumentales témoignant des jeunes années où l’émulation des maîtres du jazz manouche occupait ses journées.

L’album Silence on tourne, on tourne en rond de Thomas Dutronc est disponible en magasins depuis le 18 octobre. Il n’y a, pour l’instant, aucune date de concert prévue pour le Québec prochainement, mais l’artiste n’exclut pas la possibilité d’une visite à l’été prochain. Le dernier concert de Thomas Dutronc à Montréal remonte à l’été 2008, dans le cadre des Francofolies de Montréal.

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