Fleuve

Entrevue avec Sylvie Drapeau | «Fleuve» au TNM

Du 12 novembre au 7 décembre 2019, le Théâtre du Nouveau Monde présente « Fleuve », pièce adaptée des quatre livres autobiographiques écrits par l’actrice Sylvie Drapeau. Publiés depuis 2015 chez Leméac, « Le Fleuve », « Le Ciel », « L’Enfer » et « La Terre » décrivent la naissance de la tragédienne, dans un contexte marqué par les deuils successifs, à commencer par celui de son frère Roch, mort noyé dans le Saint-Laurent à un jeune âge. Dans une entrevue accordée par celle-ci, nous revenons sur l’origine et les enjeux de ce projet artistique.

En collaboration avec Angela Konrad

L’idée de porter la tétralogie sur la scène vient de la metteure en scène Angela Konrad, avec laquelle Sylvie Drapeau avait déjà travaillé notamment dans Golgotha Picnic en 2018. Pour Angela Konrad, il était nécessaire de garder les quatre romans, sans réécrire le texte pour l’adapter. Il a été décidé de faire de la pièce un long monologue porté par trois actrices d’âges différents.

La première, jouée en alternance par Marion Vigneault et Alice Bouchard, est associée à l’enfance et à la mort de Roch. La deuxième, jouée par Karelle Tremblay, est liée à la jeunesse et aux adieux à la mère. Sylvie Drapeau joue son propre rôle, à l’âge de la maturité. Il a d’ailleurs été difficile de jouer ses propres mots: « Pour ce qui est de mon histoire, il faut une distance, un ton. Étant donné que c’est ma vie, je me dois d’être plus distante dans le ton. Dans le rôle d’Agrippine, j’entre complètement, dans le rôle de Sylvie, je reste un peu à distance… »

Ainsi, la metteure en scène a réduit huir heures de texte à un tissu essentiel: 1h45 de mots prononcés en présence du public, dans un geste plus direct encore que l’écriture. « Elle [Angela Konrad] dirige trois monologues. La collaboration a beaucoup été dans les choix. Elle était très à l’écoute, car j’ai vécu les événements relatés. Je voulais qu’elle éprouve le Fleuve. Elle a été extraordinaire, faisant jusqu’à neuf heures de route pour aller sur la Côte-Nord. »

Le fleuve au coeur du récit 

Le Saint-Laurent est bel et bien au centre de cette traversée théâtrale, c’est pourquoi le spectacle s’intitule sobrement « Fleuve », un titre bref, mais chargé.

« Le fleuve est fondateur, parce que tout part de là. […] Il y aura des images du fleuve dans la mise en scène, là où la tragédie a eu lieu. […] C’est le Québec, le fleuve, il est représentatif de la culture québécoise.  Immense, très beau, mais aussi là où on peut perdre la vie. » Le fleuve est le lieu de la tragédie qui semble déterminer l’avenir de sa mère, morte du cancer quelques années après, de son frère Richard, atteint de schizophrénie, mais aussi de sa sœur Suzanne. Il semblerait qu’il ait aussi déterminé la vocation de Sylvie Drapeau, puisque « Fleuve » est l’histoire de la naissance d’une tragédienne, marquée par la tragédie. « La pièce est une ligne droite de 1h45 qui part de la tragédie pour revenir à la tragédienne portant sa propre parole sur la scène du TNM. »

Comme le dit si bien Sylvie Drapeau, « Une actrice, c’est d’abord un territoire occupé. Le tragique me traverse comme le fleuve traverse la terre qui nous a vus naître. »

À voir dès le 12 novembre au Théâtre du Nouveau Monde.

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