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Entrevue avec Gus Englehorn et Estée Preda | Un fabuleux destin en forme de pop-up bouquin
Il est fort possible que les habitué·es des festivals de musique émergente d’ici aient déjà remarqué le coloré Gus Englehorn, qui a participé au FME 2020, à Pop Montréal 2021, à M pour Montréal 2022, à Santa Theresa 2023 et au Taverne Tour 2025 (cliquez ici pour lire notre compte-rendu). Pour notre part, il est embarqué dans notre train sans crier gare, grâce à un communiqué de presse qui l’a enfin mis sur notre radar.
En un éclair (ou trois, un par album), ce fut le coup de foudre. Eh oui, votre scribe sensible est littéralement tombé en amour avec la musique de ce charmant troubadour doté d’un extraordinaire parcours. En connaissez-vous beaucoup des ex-snowboardeurs nomades qui vivent de musique, d’art et d’eau fraiche, quelque part entre les bacs de neige de la Belle Province et les palmiers de Lilo & Stitch?
Ainsi, il nous était absolument nécessaire d’assister à l’un de ses concerts et de rencontrer l’artisan derrière ces chansons à la fois familières et ô combien singulières. Surtout que le descriptif dont ledit communiqué l’affublait était plutôt juste (bien qu’un tantinet réducteur), le comparant à Beck et Pixies, deux marginaux héros des années 1990.
« C’est le plus beau compliment qu’on puisse nous faire », d’avouer Estée Preda, batteuse, choriste, illustratrice, complice et principale collaboratrice de l’auteur-compositeur-interprète américain, avec qui on a aussi pu discuter en amont de leur show à l’Esco il y a quelques semaines. L’on ne peut plus sympathique duo semblait plutôt fébrile, à la 11e heure de ce qui officierait de lancement montréalais de leur troisième album. Il faut dire que The Hornbook (Secret City Records) a été enregistré dans la métropole, où Estée et Gus ont par ailleurs habité pendant quelques années.
Or, l’univers musical de la paire ratisse encore plus large. Accompagné d’Estée (à la batterie, aux chœurs et aux claviers), Gus nous offre son efficace psych-folk de confection grunge, comme si Cobain reprenait Cohen ou encore si The Smile jouait du Wings et du Bowie en mode psychédélique. Vous voyez le genre (ou pas du tout, mais on s’en fout). Il y a trois décennies, on ne se serait pas cassé le bicycle et classé leurs disques sous « Alternatif ».
Cependant, il y a également un petit restant de punk dans cette attitude très DIY, alors que le dynamique duo fait tout eux-mêmes depuis leurs années de snowboard — Estée fait aussi de la planche depuis ses 10 ans. Des pochettes bricolées aux vidéoclips réalisés par madame, en passant par les compositions de monsieur.
Gus : Ce qui est vraiment le fun, quand j’ai terminé d’écrire une chanson, c’est de faire les arrangements. Comme ajouter les parties de batterie.
Estée : Normalement, quand il a un certain nombre de chansons prêtes, je me mets au drum. Mais ça peut aussi arriver n’importe quand pendant le processus. Comme on habite un studio, des fois, pendant que je suis en train de faire une illustration, je l’entends jouer et une idée de drum me vient, on l’essaie et je retourne travailler.
Estée joue de la batterie et un peu de claviers, même si elle ne se trouve « pas super bonne ». Or, l’important, dans le folk comme dans le punk, c’est ce qu’on ressent en écoutant une chanson, non? L’émotion. Et pour ça, plusieurs diront qu’ils sont pas mal bons nos deux maudits beaux tourtereaux.
Et pour Gus, chaque compo débute avec des mélodies sans mots : « Quand je commençais à comprendre comment écrire de la musique, j’ai réalisé que ça devait être fonctionner que guitare-voix, ça devait être complet. Je commence à la guitare, puis je me mets à fredonner par-dessus des sons, qui deviennent des mots, qui deviennent des histoires. »
Flore, faune bizarre et folklore
Car en plus de métisser toutes sortes de musiques, notre Gus adore raconter toutes sortes de fictions aussi mélodiques qu’insolites. Sur sa précédente offrande, dans le fond d’un donjon s’activait tout un bestiaire, incluant quelques démons à exorciser (en faisant de l’exercice!), un cheval, un lapin, une jolie tarentule et toute une panoplie de bestioles dégoûtantes (une mite, des vers). Pareil comme dans un temple dit maudit, quoi.
« Ouais, depuis la fin des années 1980, je suis attiré vers tout ce qui est weird, parce que c’est justement ce qui est le plus cool, et c’est toujours ce que je recherche aujourd’hui », de laisser tomber le chanteur.
Et dans son présent ouvrage figurent entre autres un mystérieux cyclope et un légendaire surfeur texan, de même qu’une licorne montréalaise. Au rayon invités spéciaux, on retrouve Jamie Thompson, batteur de Islands et The Unicorns (que Gus aime beaucoup). De plus, The Hornbook a été produit par Gus et Estée avec Mark Lawson, producteur primé ayant travaillé avec les groupes de Thompson et des tonnes de pointures autant en local (Islands, Arcade Fire, Bell Orchestre, Sarah Neufeld, Timber Timber, Colin Stetson, The Hot Springs, SoCalled) qu’à l’international (comme Daniel Johnston et Peter Gabriel, quand même!).
Un album mixé par nul autre que Paul Leary, membre fondateur des Butthole Surfers. Euh, pardon? Mais comment est-ce qu’un petit gars de l’Alaska transplanté à Hawaii (et presque québécois) arrive à recruter dans son équipe le guitariste d’un iconique groupe noise-punk des États-Unis d’Amérique?
Gus : J’en ai parlé à notre label, ils ont trouvé son numéro de téléphone, je l’ai appelé, et c’était le nicest dude! Et il a accepté de mixer tout l’album pour nous. Il était awesome.
Estée : J’étais là : « AHHHHHH! We’re not worthy! »
Gus : Et lorsque je l’ai texté pour lui demander s’il voulait enregistrer un bout des paroles de Metal Detector, il m’a répondu avec un smiley.
Estée : On capotait! Mais on n’était pas vraiment certain qu’il le ferait… on se disait qu’il trouvait peut-être ça trop drôle [qu’on lui demande].
Oui oui, Leary a tenu sa promesse, comme c’est bel et bien lui qu’on entend réciter les paroles de Gus au milieu de la vaporeusement bruyante Metal Detector, qui est « vraiment crinquée à 11 », comme nous la décrivait Estée.
Du coup, à la mi-mars, lors de son passage à Austin pour le SXSW, notre dynamique duo va retrouver l’ami Leary, pour collaborer (en personne cette fois) et enregistrer le quatrième album de Gus Englehorn et Estée Preda… euh, un nouvel album, déjà?
Et on parle bien du même Leary qui a fondé les Butthole Surfers en 1981 et qui a travaillé avec de petits groupes tels que Melvins, Reverend Horton Heat, Stone Temple Pilots, Sublime et U2. Ce serait un euphémisme de dire qu’on a hâte d’entendre le résultat…
Voici donc la première partie des aventures de Gus et Estée. Restez à l’affût, la suite (dans laquelle on jase snowboard, de cinéma, et cetera) suivra…
Gus Englehorn en tournée nord-américaine
• 21 février : Montréal, QC | Le Vacarme (in-store, en forme 5@7)
• 23 février : Ottawa, ON | The Rainbow Bistro
• 10-15 mars : Austin, TX | SXSW
• 31 mars : Seattle, WA | Sunset Tavern
• 1 avril : Portland, OR | Turn! Turn! Turn!
• 3 avril : Salt Lake City, UT | Vantage
• 5 avril : Boise, ID | Wylie Records (in-store)
- Artiste(s)
- Gus Englehorn
- Ville(s)
- Montréal, Ottawa
- Salle(s)
- Rainbow Bistro
- Catégorie(s)
- Folk pop,
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