Dionysos

Entrevue avec Dionysos: (Loin d’être) Finies les folies!

Le groupe pop rock fantaisiste français Dionysos est de retour avec un septième album, Bird’n’Roll, disponible chez les disquaires depuis avril.  Sors-tu.ca a jasé au téléphone avec le baron de la troupe, Mathias Malzieu, au sujet de cet univers qui gagne en extravagance en vieillissant.

Avec un album dit « de rock pour les oiseaux » où se côtoient notamment guitares, ukulélé, stylophone et verres musicaux, le tout agrémenté d’une « danse-médicament » montée de toutes pièces par une chorégraphe professionnelle, on peut dire sans se tromper que la folie de Dionysos n’est pas près de s’estomper avec Bird’n’Roll.

La pochette de Bird'N'Roll

Cinq ans après le plus récent album studio de DionysosLa Mécanique du Cœur, en 2005 – les six complices rappliquent enfin avec ce nouveau disque. Il s’agit du plus long écart entre deux albums studio de Dionysos depuis ses humbles débuts sur disque, en 1996.

Pourtant, c’était « une fausse pause », explique Malzieu. « On a fait un autre album (Eats Music) où l’on a compilé plein de versions live et de trucs inédits en 2009. Mais aussi, une tournée acoustique de 15 dates, en plus de la tournée de La Mécanique du cœur, un projet de film d’animation, un petit court métrage nommé Le Loup à poil, une reprise de Bashung pour un hommage à Bashung… Babet (Élisabeth Maistre, voix féminine du groupe) a fait un disque, aussi, auquel j’ai participé ».

Bref, tout le monde au sein de Dionysos n’a jamais été aussi occupé qu’au cours de ces cinq dernières années séparant La Mécanique du Cœur de Bird’n’Roll.

« Chacun s’émancipe à l’intérieur et à l’extérieur. Logistiquement, c’est un peu le bordel, mais un beau bordel. Ça conserve un élément de surprise entre nous et ça nous rassure qu’on est là pour les bonnes raisons. Après 19 ans, c’est la meilleure solution qu’on a trouvée pour pouvoir continuer ».

 

Du plus mauvais cascadeur du monde au Grand cheval aux yeux gris

Comme la plupart des albums de Dionysos, Bird’n’Roll dessine une panoplie de personnages colorés, dont Tom Cloudman, Dreamoscope (tous deux tirés d’un roman de Melzieu, Métamorphose en bord de ciel) et Le Retour de Jack l’inventeur (personnage incarné par Alain Bashung sur Le Mécanique du cœur qui revient sur le nouvel album).

Ce n’est pas la première fois que Dionysos transpose des personnages de romans en chansons, et vice versa : l’expérience avait été tentée en partie sur Western Sous la neige (2002) puis sur Monsters In Love (2005), notamment.

Le Grand Cheval aux yeux gris, elle, a été écrite pour Alain Bashung. « En gros, je me suis imaginé ce qu’il aurait été s’il avait été un cheval. Je l’ai écrite pour qu’il la chante en personnage. Il l’aimait bien et il l’aurait sans doute chantée si la santé s’était mieux passée. J’avais envie qu’elle existe. Elle se prêtait bien aux couleurs de l’album, alors on l’a insérée comme un interlude ».

 

Pour un championnat mondial de Bird’n’Roll

« C’est complètement absurde », acquiesce placidement le chanteur au bout du fil lorsqu’on aborde cette idée farfelue de faire créer une danse pour une chanson pop rock.

Voyez-vous, le « Bird’n’roll » n’est pas qu’un titre d’album tiré de sa chanson éponyme. Dionysos a fait appel à Johanna Hilaire, une chorégraphe professionnelle, afin de monter une chorégraphie, une « danse-médicament, mi-humaine mi-oiseau, qui sauve de la mélancolie », rien de moins.

C’est comme ça avec Dionysos : l’idée farfelue que plusieurs abandonneraient en cours de route est poussée à l’extrême…

« J’aime l’idée de monter un championnat du monde de Bird’n’Roll, lance-t-il le plus sérieusement du monde. Il y a toujours des records Guinness complètement absurdes, tu sais, comme le plus long bisou à la femme la plus petite du monde ou je ne sais trop quoi. J’aime ce côté héroïque miniature d’un champion du monde d’une danse inventée ».

Cette folie semble être contagieuse puisque le Consulat Général de France au Québec proposait des cours de danse gratuits au studio de danse du Conseil des Arts de Montréal en vue de permettre aux fans montréalais d’apprendre la danse à temps pour le concert du groupe de ce soir aux Francofolies.

Ouvertement inspiré de cette philosophie de William Blake selon laquelle il faut traiter avec beaucoup de sérieux les sujets les plus absurdes, Dionysos se prend au sérieux dans son absurdité et aime bien jouer avec les contrastes de ton dans l’instrumentation, comme en témoigne la place de choix qu’occupent des instruments inusités comme la scie musicale, les verres musicaux et le stylophone.

« Il y aurait un snobisme terrible à se la péter en artiste snob et faire la gueule sur scène en jouant aux artistes sérieux. D’un autre côté, on ne veut pas offrir de la musique jetable non plus, qui se vend comme on va s’acheter un hamburger ».

« Si je ne suis pas convaincu qu’il y a une aventure dans ce que je propose, je ne me sens pas honnête de monter sur une scène pour aller défendre ce que je fais ou d’en parler avec vous en entrevue ».

« Il y a une autodérision intéressante là-dedans, tant que tu le fais avec conviction. Je trouve qu’une chanson mélancolique avec des verres d’eau, c’est plus fort émotionnellement que le bon vieux violon pour appuyer un moment triste. En tant que musiciens, nous avons droit à une tribune, un terrain de jeu intéressant, où il faut laisser une petite place à la surprise. Surtout dans cette vie toujours si cloisonnée. Pour nous, c’est comme ajouter des petits pétards au rock que nous proposons ».

* Dionysos sera de passage à Montréal le jeudi 7 juillet 2012 pour un concert sur la Place des Festivals dans le cadre de la soirée d’ouverture, avec également Daran, Les Revenants et Pierre Lapointe au menu.

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