
Entrevue avec Cathy Fuoco, qui présente une ode tendre et drôle à ses racines italiennes
Avec son deuxième spectacle, Ma famille italienne, Cathy Fuoco offre bien plus qu’un simple numéro d’humour : elle convie son public à un voyage intime dans son univers familial, où se croisent anecdotes savoureuses, traditions transmises et réflexions universelles sur l’identité. Après le succès de Mes bananes vertes, un premier spectacle qui lui a servi de catharsis en abordant son divorce, l’artiste plonge cette fois au cœur de ce qui la définit profondément : ses origines italo-québécoises.
Jointe via Zoom à Québec, où elle donnait le week-end dernier un spectacle au Parc de l’Esplanade, Cathy Fuoco décrit sa famille comme une véritable mine d’or créative. « C’est un puits pas de fond, dit-elle. Constamment, je me surprends à noter des manies, des expressions ou des situations qui méritent de devenir une capsule ou un sketch. » Son entourage immédiat – parents, tantes, cousins – fournit une matière inépuisable, souvent caricaturale, mais toujours empreinte d’affection.
Avec humour, elle compare son clan à un « code postal » unique : tout le monde vit dans le même périmètre de Villeray, ce qui accentue l’impression d’être plongée dans un village soudé, bruyant, envahissant parfois, mais toujours bienveillant.
Née au Québec de parents d’origine italienne – un père immigrant arrivé dans les années 1960 et une mère québécoise – Cathy Fuoco a grandi dans un univers hybride. « Tous mes cousins, comme moi, on a été élevés dans les années 1980… mais à la manière des années 1950 », raconte-t-elle en riant. Pendant que ses camarades regardaient Goldorak ou Candy, elle se retrouvait à lire Dante Alighieri à l’école italienne du samedi.
Cette double appartenance culturelle, parfois source de décalage, est devenue une richesse artistique. « Tu te rends compte que tu n’es jamais tout à fait comme les autres. Pas assez pour être exclue, mais assez pour sentir que ta vie n’est pas pareille », explique-t-elle. De ce sentiment marginal, elle tire aujourd’hui un moteur créatif puissant.
De l’intime à l’universel
Si Ma famille italienne s’ancre dans le particulier, le spectacle vise avant tout à toucher un public large. Cathy Fuoco l’assure : ce n’est pas un spectacle « pour Italiens ». Les références à la culture populaire québécoise et/ou universelles – du Walkman jaune Sony à la chanson Life is Life par exemple – créent des ponts de complicité avec la salle. « À partir du moment où tu parles de ce que tu connais, de ce que tu vis, les gens connectent », affirme-t-elle.
La finale illustre bien cette volonté d’universalité. Fuoco y fait un parallèle entre son propre saut en parachute – une quête personnelle de courage – et celui de ses ancêtres quittant l’Italie pour le Canada. « Il n’y a pas de plus grand saut que de laisser derrière soi son pays, sa langue, ses repères. Quand je parle de ça, le public comprend que, même s’il n’est pas Italien, il a forcément déjà reçu des tomates d’un voisin ou goûté des aubergines marinées. Et c’est là que la magie opère. »
« Amouriste » plus qu’humoriste
Cathy Fuoco refuse l’étiquette stricte d’humoriste. Elle préfère se définir comme une « amouriste » : une conteuse qui mélange rires, émotions et tendresse. Son objectif n’est pas de provoquer des éclats de rire à tout prix, mais de faire réfléchir, sourire et parfois émouvoir. « Ce que je raconte, je le vis, dit-elle. Je ne peux pas me cacher derrière une fausse émotion. L’authenticité, c’est ce qui permet d’aller chercher les gens. »
Cette authenticité transparaît aussi dans son approche de l’écriture. Elle s’impose deux règles : ne jamais mettre quelqu’un inutilement mal à l’aise, surtout pas les gens de sa famille dont elle expose les récits, et s’assurer que ses enfants n’aient pas honte de ses propos sur scène. « Tout est toujours bienveillant », insiste-t-elle, même quand elle taquine sa mère en direct, installée dans la salle lors des représentations de rodage.
De toute façon, il y a place à ajustements, Cathy Fuoco étant une artiste visiblement en inspiration constante. Au moment de notre entrevue, elle s’est mise à répéter un mot italien pour ne pas oublier l’inspiration qui venait de lui passer par l’esprit, un concept qu’elle exploitera dans l’une de ses capsules-balados prochainement (lire ci-bas).
Le spectacle Ma famille italienne n’est d’ailleurs pas figé. La réalité familiale vient sans cesse l’alimenter. « Le show était terminé, bien ficelé, raconte Fuoco. Puis le cousin de mon père est décédé. Le passage au salon funéraire est devenu un nouveau bloc incontournable. Ce n’est pas moi qui décide, c’est ma famille! », laisse-t-elle tomber en riant.
Cette dimension évolutive rend chaque représentation unique. Le spectacle devient un reflet vivant, parfois improvisé, de l’histoire collective d’une diaspora et de ses traces dans le quotidien montréalais.
De la scène aux capsules
En parallèle de son travail sur scène, Cathy Fuoco alimente depuis plusieurs années La Minute italienne, une série de capsules humoristiques diffusées en ligne et à la radio. Ces courtes pastilles, souvent inspirées de suggestions de sa famille, prolongent l’univers du spectacle et témoignent de sa volonté de transmettre un héritage culturel.
« C’est un leg, dit-elle. J’ai le sentiment de garder vivante une langue, des traditions, une façon de voir le monde. Et ça me touche de savoir que des gens en Belgique ou au Maroc écoutent ces capsules et se reconnaissent dans les histoires. »
Au-delà des blagues et des situations cocasses, Ma famille italienne et ses capsules se veulent un hommage. Cathy Fuoco conclut son spectacle en rappelant le courage de ses parents et de toute une génération venue chercher en Amérique un avenir meilleur. « Il n’y avait pas de retour possible. Il fallait que ça marche. Pour moi, ce sont des super-héros », dit-elle avec émotion.
Elle insiste : il ne s’agit pas de « vivre dans le passé », mais de « savoir d’où on vient pour pouvoir avancer ». Cette phrase, répétée en clôture de spectacle, résume toute la philosophie de l’artiste.
Les prochaines représentations de Ma famille italienne de Cathy Fuoco
7 septembre – Montréal, Comédie de Montréal
12 septembre – Saint-Lin-des-Laurentides, Salle Opale
14 septembre – Montréal, Comédie de Montréal (supplémentaire)
21 septembre – Montréal, Comédie de Montréal (supplémentaire)
7 octobre – Montréal, Maison de la Culture NDG – Auditorium
Détails et billets sur le site officiel de l’artiste.
* Cet article a été produit en collaboration avec Cathy Fuoco.
- Artiste(s)
- Cathy Fuoco
- Ville(s)
- Montréal, Saint-Lin-Laurentides
- Salle(s)
- Maison de la culture Notre-Dame-de-Grâce , Salle L'Opale, Théâtre La Comédie de Montréal
- Catégorie(s)
- Conte, Humour,
Événements à venir
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