Alexandre Désilets

Entrevue | Alexandre Désilets explore la nuit avec son Fancy Ghetto

L’aventure nocturne. La pop dansante. Les personnages anti-héros. Un lexique street. Alexandre Désilets avait en tête un univers bien particulier pour son troisième album, son Fancy Ghetto. 

Sur la pochette, une photo originale prise sur son toit, au zénith. On le voit à l’avant-plan, décoloré. Au loin, la ville. À première vue, on dirait qu’il agite un blouson vers le ciel. « En fait, je rabats la nuit sur le jour », corrige-t-il.

C’est concept. Tout comme ces cartes que l’on retrouve à l’intérieur de la pochette. Au lieu du simple livret, Alexandre Désilets avait l’idée d’y insérer des photographies, comme des photogrammes de films fictifs, une pour chaque chanson. Chacune de ses oeuvres des frères Jourdain (Fred au design, Thony aux photographies) nous présente un personnage dans un lieu. Il y a toujours un contexte flou, une ambiance intrigante, difficile à cerner, ainsi qu’une phrase – une seule – tirée du texte de chaque chanson.

« L’idée était qu’on comprenne déjà qu’il s’agit d’histoires, de personnages. On sent déjà l’amour, la nuit, la nostalgie, la solitude. »

« Le mot qui revenait souvent, c’était street« 

Fancy Ghetto, vous l’aurez compris, explore la vie nocturne. « Ce sont toutes des histoires qui se passent la nuit, dans un genre de nightlife. Ce sont tous des personnages dans le fancy ghetto, dans un monde contemporain. Toutes des histoires romantiques, chevaleresques. La nuit est très présente partout. »

« Ce qui m’intéresse, c’est les parcours de ces personnages-là. Et j’aime l’idée que ce soit des anti-héros : ce sont des Woody Allen, des Quasimodos, des Don Quichotte. Ils sont très romantiques. En même temps, il y a une fatalité ; le soleil va se lever et ça doit se passer pendant la nuit. J’aime cette idée-là. »

Photo de courtoisie, par Caroline Désilets.

Photo de courtoisie, par Caroline Désilets.

Pour donner vie à ce concept, Désilets a travaillé les textes avec Mathieu Leclerc (The Last Assassins). « C’est un gars qui ressent beaucoup les mots. Moi je suis comme ça: il y a des phrases, des mots qui vont me toucher beaucoup. Mathieu est aussi comme ça, dans sa tête, ça roule tout le temps ».

La co-écriture a été bénéfique, non seulement pour la créativité, mais aussi pour assurer la crédibilité de l’affaire. « Il a un côté très street, donc ce sera jamais convenu, souligne-t-il avec insistance. C’est un bon baromètre, parce que s’il y a quelque chose d’un peu convenu ou quétaine, il va sonner l’alarme rapidement ».

Les deux complices ont effectué un grand travail au niveau du lexique. « On voulait quelque chose d’urbain, de contemporain. »

 

Inventer sa pop

Musicalement, Fancy Ghetto est très rythmé, animé par cette énergie de la nuit, encore une fois. Le principal intéressé ne s’en cache pas : il aimerait rejoindre les gens, augmenter sa portée, lui dont les précédents albums Escalader l’ivresse (2006) et La Garde (2010) ont récolté un beau succès critique, sans que la reconnaissance populaire ne suive réellement.

Mais ce n’est pas tant la percée commerciale qui l’intéresse que le désir de faire bouger l’auditeur, d’insuffler du rythme à sa musique. Une passion grandissante pour la danse – en grande partie nourrie par sa participation au projet de tournée Danse Lhasa Danse – l’a mené sur ce sentier. On le perçoit non seulement dans le son, mais également dans le vidéoclip du premier extrait, Renégat.

Bien qu’il ne cherche pas à tout prix la reconnaissance populaire et celle des radios commerciales, Désilets ne peut tout de même pas cacher un sourire lorsqu’on lui indique que Renégat jouait sur les ondes de CKOI dans le taxi en route vers l’entrevue. « Je n’en veux pas aux radios d’avoir boudé mes chansons par le passé. C’est une question de contexte, d’avoir le bon son, le bon format, au bon moment », laisse-t-il entendre, avant d’admettre, du même souffle, que « ça fait tout de même du bien de voir que ça répond bien cette fois ».

Car Alexandre Désilets ne s’en cache pas : son approche est 100% pop. « C’est presque péjoratif de faire de la pop. Il y a de la pop qui suit les conventions, qui respecte une recette et qui refait ce qui a déjà été fait. Mais ce n’est pas parce que tu fais de la pop que tu vas nécessairement dans les sentiers connus. Nous, on a voulu aller au front, foncer dans une pop inconnue, avec nos sons, nos mélodies, nos affaires. »

Si l’album a été conçu avec une équipe de feu – Olivier Langevin à la guitare, François Lafontaine au piano et synthés, Samuel Joly à la batterie et François Plante à la basse – le chanteur promet que le band qui l’accompagnera en tournée fera honneur à cette nouvelle énergie.  « J’ai des tueurs pour le show live », assure-t-il.

À défaut d’avoir Olivier Langevin avec lui sur la route, Jocelyn Tellier (Dumas) s’occupera de la guitare, alors que François Richard s’installera derrière les claviers et Jérôme Hébert, un complice de longue date, à la basse. Samuel Joly complète la formation.

« C’est un show qui se veut dansant, qui est très ballroom. Un mélange de Motown et de rythmes africains. Je me suis muni de chansons qui vont me permettre de m’éclater sur scène. J’aurai jamais eu un show aussi vivant que ça. Et ça tombe bien, parce que j’ai envie de bouger, de danser.  »


 

* Lancement ce soir (11 février) au Cabaret du Mile-End.

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