Dear Criminals au Théâtre Outremont | Concerts d’exception pour un trio d’exception
Plutôt discret ces dernières années, le trio indie pop électro Dear Criminals (Frannie Holder, Charles Lavoie et Vincent Legault) est réputé pour transformer chaque performance en une expérience artistique singulière.
En 2019, ils surprenaient le public du Gesù en réinventant leur musique avec l’Orchestre philharmonique des musiciens de Montréal. En 2020, en pleine pandémie, ils brisaient l’isolement avec une série de concerts ultra-intimistes, jouant pour un ou deux spectateurs à la fois une chanson de leur choix.
Fidèle à leur réputation, ce samedi Dear Criminals a fait un retour sur scène éclatant au Théâtre Outremont, en offrant non pas un, mais bien deux concerts déclinés en deux formules distinctes.
Le premier a eu lieu en après-midi dans le cadre de la série « Concerts pour toutes les oreilles » où des prestations d’une durée maximale d’une heure sont présentées, à volume réduit, en après-midi. La formule parfaite pour les mélomanes qui veulent faire découvrir à leurs enfants le plaisir de la scène. Ce que notre rédacteur en chef Marc-André Mongrain a fait, avec sa fille Zoé, 4 ans. Voir paragraphe ci-bas.
En soirée, c’est plutôt une formule à grand déploiement à laquelle nous avons eu le droit, alors que le trio était accompagné d’un quatuor à cordes, d’un batteur et d’un bassiste.
Sors-tu? a assisté aux deux représentations.
En après-midi, pour « toutes les oreilles »
(expérience relatée par Marc-André Mongrain)
Quel concept absolument nécessaire!
L’organisme « Concerts pour toutes les oreilles » vise à offrir une plus grande accessibilité aux concerts pour le grand public et surtout, le public familial. On connaît tous des parents qui souffrent — le mot est délibéré ici — de ne plus pouvoir assister à autant de concerts une fois l’arrivée des enfants dans leur vie. Et forcément, le désir intense de partager cette passion de la musique live à notre progéniture se fait sentir, mais les occasions sont limitées.
« Concerts pour toutes les oreilles » s’associe donc à plusieurs salles de spectacles afin d’offrir des opportunités de concerts accessibles, adaptées aux parents et à leurs enfants. Jusqu’à récemment, l’expérience était surtout concentrée dans la ville de Québec, mais les Grands Bois de St-Casimir présenteront un spectacle de Klô Pelgag dans cette configuration, Maximum 90 à Carleton-sur-Mer présentera un concert d’Avec pas d’casque dans ce contexte également, et voilà que le Théâtre Outremont se prête au jeu avec Dear Criminals.
En quoi ça consiste, concrètement? À un concert « plus tôt, moins long et moins fort », c’est-à-dire présenté en plein jour (14h), pour une durée maximale d’une heure, et avec une sonorisation adéquate pour les petites oreilles en modérant les décibels.
Les trois membres de Dear Criminals ont joué le jeu de façon admirable, en présentant leurs douces chansons texturées dans une ambiance calme et sereine, même si quelques pleurs se faisaient entendre ici et là. « Je comprends la spectatrice d’avoir pleuré, elle me fait peur moi aussi, cette chanson! », de rigoler Charles Lavoie après Visions.
Le matériel du groupe n’est pas censuré pour autant, même si le groupe espère que « les enfants ne comprennent pas trop l’anglais ici ». Les parents ont pu se réjouir d’entendre des versions épurées de Cold Wave, Coco, Stay Tonight ou encore SLOWDISCO, que les plus jeunes spectateurs ont semblé apprécié également, si l’on se fie au niveau d’écoute attentif et aux quelques danseurs qui bougeaient au rythme de la musique.
Pour voir tous les « Concerts pour toutes les oreilles » présentés dans diverses villes du Québec ces prochains mois, consultez la page officielle de l’organisme.
En soirée, un moment d’exception qui méritait d’être immortalisé
Quelques heures plus tard, Dear Criminals et ses musiciens invités ont livré un concert d’une rare perfection, pour un public plus adulte et plus habitué à l’univers du groupe. À peine la dernière note résonnée, l’envie de revivre ce moment était déjà bien présente.
Aucun mot, aucune description ne pourrait rendre justice à ce que nous avons vécu et entendu samedi soir au Théâtre Outremont. Seule une captation audio ou vidéo de qualité pourrait rendre justice à cette soirée, mais tentons malgré tout de l’évoquer par écrit.
Tout d’abord, les arrangements de Vincent Legault, qui ont habillement intégré le quatuor à cordes aux textures électroniques caractéristiques du groupe, étaient remarquablement aboutis. Le jeu des instruments – piano, claviers, synthétiseurs, séquenceurs, violons, contrebasse, guitares acoustiques et électriques, basse et batterie – s’enchaînait dans une chorégraphie sonore des plus diversifiées.
Sur Yet Not the End, les voix en harmonie de Charles Lavoie et Frannie Holder offraient une touchante berceuse, accompagnée uniquement par une guitare acoustique en introduction. Sur Song For Elisabeth, la basse de Jonathan Arsenau servait de fil conducteur entre guitares électriques, synthétiseurs et violons. Tout le concert, de cette manière, alternait entre de surprenantes variations d’instrumentation, en parfait équilibre.
Ces arrangements ont été magnifiquement servis par la qualité des musiciens, qui ont joué avec une telle prestance qu’on aurait cru assister à leur vingtième représentation. L’acoustique du Théâtre Outremont était exceptionnelle, et la balance sonore de Benoit Bouchard irréprochable. Chaque élément sonore semblait à sa place : les voix parfaitement audibles, sans jamais écraser les instruments, chaque son trouvant sa place dans l’ensemble.
Ce n’était pas une simple performance musicale ; c’était une immersion totale dans un univers émotionnel, où chaque chanson résonnait jusque dans nos viscères. Une intensité magnifiée par les voix sensuelles et feutrées de Frannie Holder et Charles Lavoie, tous deux d’un charisme stupéfiant. Leurs voix, suaves et envoûtantes, nous enveloppaient comme des mots doux murmurés à l’oreille.
Pour tenter de décrire l’univers complexe du concert, citons l’exemple de Petite mort, jouée en rappel. L’introduction du quatuor à cordes ouvrit le morceau, avant que Dear Criminals ne revienne sur scène. Un silence profond se fit entendre, puis les notes du piano à queue de Vincent Legault envahirent la salle avec une douceur extrême.
Frannie Holder entama doucement : « Take my hand, and I will be your friend. » Le quatuor de cordes ajouta ensuite une couche musicale majestueuse à cette berceuse, tandis que Charles Lavoie poursuivait : « It’s another way for you to hide to say love is safe and it will follow. » La voix de Holder se joignit à nouveau à lui, formant une harmonie qui monta en intensité. La batterie entra doucement, mais annonçant un chaos imminent. Le volume monta, les deux voix répétant le refrain avec de plus en plus de force, la batterie introduisant ses cymbales, la basse prenant de la profondeur, tandis que les violons et les synthés tissent une tornade musicale, complexe et saturée, où un chaos dissonant succédait au début en douceur.
Ce fut sans conteste mon meilleur concert de l’année. Comme cadeau au Père Noël, je demanderai une réédition de cette soirée parfaite, afin qu’elle soit captée et immortalisée pour toujours en audio et vidéo.
Grilles de chansons
En soirée
- Visions (Fatale)
- Starless (Fatale)
- Waste land (Fatale)
- Little Thief (Lullaby)
- Yet Not the End (Fatale)
- Mark My Words
- Nelly (Nelly)
- Cold Wave (Another Picture)
- Gravedigger (Fatale)
- Song For Elisabeth (Strip)
- Lover’s Suicide (Weapons)
- At Bay (Lullaby)
- Lies in Blue (Lullaby)
- Lala
- Coco (Lullaby)
- Rose (Crave)
- Slowdisco (Strip)
- Stay Tonight (Crave)
Rappel
- Petite Mort (Crave)
- Where We Started (Lullaby)
En après-midi
- Visions
- Little Thief
- Crave
- Lovers Suicide
- Storm
- Lala
- Cold Wave
- Took it from me
- Coco
- Stay tonight
- Lies in blue
- SLOWDISCO
- Fuck the stars
- Where we started
Photos en vrac
(prises en après-midi)
- Artiste(s)
- Dear Criminals
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- théâtre outremont
- Catégorie(s)
- Electro, Electropop,
Vos commentaires