Critique | The Ghost of a Saber Tooth Tiger à la Sala Rossa

« Nous sommes le fantôme du tigre avec les dents en sabres… Humm… C’est pas tellement plus clair en anglais… »

Sean Lennon prenait grand plaisir à parler français, mercredi soir, sur la scène de la Sala Rossa. Un français qu’il bricole plutôt habilement. Son groupe, The Ghost of a Saber Tooth Tiger (ou « GOASTT ») était de passage pour une toute première fois à Montréal, afin de présenter les chansons de Midnight Sun, nouvel album paru en mai, qui fait son petit bonhomme de chemin grâce à des critiques généralement favorables et un bouche-à-oreille assez efficace.

« C’est vrai que le groupe Yes a démarré sa carrière grâce à son succès au Canada?, demande Lennon à la foule, entre deux chansons. Vous savez qui m’a dit ça ? C’est Kate McGarrigle. Elle m’a dit que j’aurais peut-être des chances par ici… »

C’est vrai qu’il y a une conjecture parfaite pour GOASTT à Montréal.

 

Le début de quelque chose…

D’ailleurs, à première vue, le fait que le fils de John Lennon, sa compagne Charlotte Kemp Muhl et leurs musiciens se produisent à la Sala Rossa peut sembler un peu trop modeste, mais la petite salle du quartier portugais à Montréal n’affichait pas tout à fait complet. À vue d’oeil, on aurait dit que 150 à 200 personnes s’étaient déplacés pour l’occasion. Ça sentait le début de quelque chose…

Sur scène aussi, ça sentait le début de quelque chose. De quelque chose de gros, ceci dit.  Le groupe n’est pas encore parfaitement rodé, mais par moments, ça décolle.

GOASTT commence visiblement à prendre ses aises avec ce nouvel album. L’identité musicale du groupe, Lennon et cie l’ont finalement trouvée avec ce brillant Midnight Sun ; après quelques démos et EP acoustiques, qui donnaient plutôt dans le folk, le groupe s’adonne maintenant à un rock très 70’s, aux effluves de prog-rock, de psychédélisme et de space rock, tout en conservant une touche moderne et un flair pop qui plaît dès la première écoute.

Pas étonnant, alors, que la vaste majorité de la grille de chansons soit constituée des chansons de Midnight Sun. À commencer par Too Deep, Xanadu et Animals, qui lancent aussi le disque, dans cet ordre. Puis la chanson titre, la Gainsbourgesque Johannesburg, chantée par Kemp Muhl – qui se débrouille très bien à la basse, soit dit en passant – et la Beatlesque Poor Paul Getty. Quelques solos endiablés, mais dans l’ensemble, c’était plutôt fidèle à l’album, avec une certaine retenue… On aurait préféré moins sage, mais tout de même, c’était fort appréciable comme premier contact.

Le set s’est terminé par Moth To A Flame, plus appliquée sur disque que sur scène, mais plus puissante sur scène que sur disque, surtout avec son solo aux effets parfaitement calibrés. Plutôt statique tout au long du show, Sean se donnait finalement corps et âme pour cette dernière, à genoux sur scène, à savourer cet électrisant solo.

La troupe est revenue pour un court rappel, avec la jolie The World Was Made For Men, première chanson co-écrite par les deux amoureux, et sans doute une réponse inconsciente au Woman Is the Nigger of the World du paternel. Puis, la cerise sur le gâteau : une relecture savoureusement psychédélique de Long Gone, de Syd Barrett.

Dans l’ensemble, The Ghost of a Saber Tooth Tiger a fait ce qu’il fallait pour entretenir la curiosité envers le projet et faire honneur à cet excellent album qu’est Midnight Sun, l’une des grandes réussites parmi les sorties CD du printemps.

Le groupe sera de retour à Montréal dans moins d’un mois, en première partie de Beck, à la Salle Wilfrid-Pelletier, le 25 juin. Ce sera intéressant de voir ce que ça donnera dans un contexte aussi différent…

(Photos à venir)

Grille de chansons

1. Too Deep
2. Xanadu
3. Animals
4. Midnight Sun
5. Le Jardin du Luxembourg
6. Golden Earrings
7. Johannesburg
8. Poor Paul Getty
9. Devil You Know
10. Moth To A Flame

Rappel
The World Was Made For Men
Long Gone (reprise de Syd Barrett)

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