Kanye West

Critique album: Jay-Z et Kanye West – Watch the Throne

Kanye West - Watch the Throne Kanye West Watch the Throne

Quand deux grosses gommes comme Kanye West et Jay-Z s’unissent pour un album, s’autoproclament The Throne et proposent une pochette recouverte d’or qui se déplie en forme de croix, il faut d’emblée accepter que la modestie ne sera pas au rendez-vous.

Présenté comme le nouveau Graal du hip-hop, cette collaboration clinquante souffre pourtant davantage de la dichotomie entre la sensibilité vintage et le débit fluide de Jay-Z et l’approche plus (strip)club et bling-bling de Kanye West que de ses prétentions. En d’autres mots, la grosseur des ego impliqués représente moins un problème que la difficulté évidente à les faire fusionner.

 

Liés par la fatuité

Pourtant, Jay-Z et Kanye West se rejoignent dans leur excès de vanité sur Watch the Throne. Les analogies religieuses et royales pleuvent (souvent pour comparer les deux compères à des dieux ou des rois), leur opulence est exposée à outrance et les quelques commentaires politiques insérés ici et là semblent avoir été écrits par deux millionnaires en jet privé, loin de la réelle complexité de la misère décriée.

Même si cette arrogance peut paraître agaçante sur papier, Watch the Throne n’est certainement pas sans charme, surtout sur le plan musical. Les deux talents engagés dans cette prestigieuse aventure parviennent évidemment à créer quelques petits bijoux mélodiques et rythmiques: l’excellente That’s My Bitch (qui contient des extraits de James Brown et Incredible Bongo Band), Niggas in Paris et ce petit luxe que ce sont payé Jay-Z et Kanye West de raconter leur bonne fortune sur une trame essentiellement construite autour du classique Try A Little Tenderness d’Otis Redding (Otis).

En revanche, l’infâme effet Auto-Tune trouve son chemin sur l’album, ce qui en fera décrocher plus d’un, dès le départ avec le bridge de No Church in the Wild. Heureusement, la ligne de basse hypnotique, le refrain de Frank Ocean et le bagout des deux rappeurs sont suffisants pour faire de la chanson initiale une réussite, malgré ce bridge superflu.

Ce n’est pas le cas de New Day qui, elle, sombre dans l’excès d’artifices. Il faut dire que ça prend du culot pour acheter les droits sur un extrait de Nina Simone – Feeling Good, de surcroît ! – et de lui réserver le traitement le plus surutilisé au monde (Auto-Tune), au point de la rendre à peine reconnaissable.

Et tant qu’à nager dans les clichés Kanyesques, le résultat de cette gaffe qu’est New Day regorge de « huh » et autres « yeah ! », comme une mauvaise trame à striptease que les rythmes de RZA (Wu-Tang Clan) ne parviennent pas à sauver de la médiocrité.

Ni génial ni atroce, Watch the Throne comporte d’inévitables réussites et quelques ratés, rien d’étonnant dans le contexte, finalement. Après tout, on peut difficilement faire un chef d’œuvre à partir d’un exercice de style.

* Rappelons que Jay-Z et Kanye West seront au Centre Bell, à Montréal, le 22 novembre 2011 (plus de détails)

 

Moments forts :
That’s My Bitch, No Church In the Wild, Otis, Who Gon Stop Me, Murder to Excellence

Moments moins forts :
New Day, Made In America, Gotta Have It

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