Critique album: David Giguère – Hisser Haut
Le comédien et musicien David Giguère lance finalement son premier album Hisser haut, une collection de 13 chansons variées à souhait, « pimpées » par une production aboutie, mais étourdissante (signée Pilou). Sympathique, assumé, mais un peu éparpillé.
Son premier disque n’était même pas encore lancé qu’il suscitait déjà des impressions fortes, pour le meilleur et pour le pire, tel un Lana Del Ray québécois. Prestation publique décevante en moins, heureusement…
Plusieurs avaient remarqué sa gueule de postadolescent urbain dans le film Starbuck, alors qu’on pouvait le voir chanter L’Atelier dans le métro. Suivirent ses photos de presse « stylisées » à la Gainsbourg en noir et blanc, sa réputation de « théâtreux » qu’il souhaite déjà séparer de sa carrière musicale et son association avec Ariane Moffatt, dont il est le protégé. Il y avait déjà là suffisamment d’indices pour se faire une idée du personnage.
La plupart de ces indications sont toutefois trompeuses; David Giguère a fait ses devoirs, a mené son petit bonhomme de chemin afin d’évoluer à titre d’auteur-compositeur interprète sans bousculer les choses.
Son métier d’acteur lui sert et lui nuit: on sent l’aisance dans l’interprétation, l’intention de survoler le quotidien sans se prendre les pieds dans l’obsession du terre-à-terre, mais par moments, Giguère semble aussi forcer la note.
Le succès de David Giguère passera beaucoup par l’appréciation que les auditeurs se feront de son chant, par moments un peu maniéré (surtout dans les instants plus soul ou groovy, comme C’est pas elle et Madame M), mais au timbre généralement agréable et singulier. Mention spéciale au niveau du langage: les textes de David Giguère empruntent un juste ton québécois, ni français international, ni joual appuyé. De jolis enchaînements de mots qui forment de vagues images figuratives souvent efficaces, ou des réflexions poétiques plus ou moins profondes au sujet des aléas amoureux.
Sur le plan de la composition, les chansons de David Giguère sont plutôt simples au fond, dans le bon sens du terme. Une fois qu’elles nous sont familières – au bout de 2 ou 3 écoutes – on peut facilement s’imaginer le jeune homme les interpréter seul au piano, se représenter mentalement les versions brutes de ces chansons pop traitant des aléas d’un jeune homme comme tant d’autres qui vit sa mi-vingtaine.
L’habillage musical transforme ces titres en toutes sortes de déclinaisons, si bien que l’album part dans tous les sens. Les moments les plus posés sont souvent les meilleurs: le trip-hop Moffattesque de la chanson titre, la sympathique 1-2, le premier extrait L’Atelier et la touchante ballade au piano Comme toi.
Paradoxalement, on peut se permettre de juger David Giguère avec un peu plus d’aplomb parce qu’il bénéficie d’une production suffisamment sérieuse (presque immaculée) pour se retrouver d’emblée dans la cour des grands. Il ne faudrait pas oublier pour autant qu’il s’agit d’un premier disque, d’un début de parcours, et que l’artiste semble avoir l’intention de se forger sa propre personnalité musicale, indépendamment du métier qui nous l’a fait connaître à priori. Tant mieux.
Un bon départ, imparfait, mais prometteur.
* Lancement gratuit ce soir au National, à 20h.
- Artiste(s)
- David Giguère
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Le National
- Catégorie(s)
- Electro, Pop,
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