Cindy Lee

Cindy Lee au Théâtre Rialto | Comme un bref rêve semi-conscient

Après avoir abruptement annulé sa tournée de l’an dernier pour des raisons personnelles, Cindy Lee, le projet de Patrick Flegel, ex-leader de la formation albertaine Women, remet ça par les temps qui courent et était de passage en formule solo au Rialto pour deux soirs à guichet fermé. Au cours de cette soirée : plusieurs titres inconnus ou plus anciens côtoyant des morceaux de son éblouissant chef-d’œuvre Diamond Jubilee, considéré par plusieurs comme le meilleur album de 2024.

Il fallait vraiment que la venue à Montréal de cette figure marquante de la musique indie canadienne soit attendue pour remplir deux fois le Rialto pendant des soirs de semaine de tempête de neige, avec une grève de la STM par-dessus le marché! Disons que ça prenait un certain effort, comme il en faut pour trouver le catalogue de Cindy Lee en ligne, l’artiste ayant totalement déserté les plateformes, à l’exception de Bandcamp.

Mais celles et ceux qui auront pris la peine de découvrir sa discographie – plus particulièrement Diamond Jubilee – étaient au rendez-vous pour assister à un moment privilégié avec le personnage; moment qui, au final, aura passé en coup de vent : en 58 petites minutes, rappel compris, l’affaire était pliée. Bien qu’il vaille toujours mieux assister à une prestation plus concise plutôt qu’à un concert qui s’éternise, force est de constater que cet instant en compagnie de Lee/Flegel s’est avéré trop court. On se serait cru dans un rêve semi-conscient, où on a voulu préserver certains moments pour d’autres retrouvailles. C’était un peu comme acheter un billet de cinéma (à plus fort prix) pour voir un film de moins d’une heure : aussi bon puisse-t-il être, on risque de rester sur sa faim!

Avec un peu d’aide de la bande (sonore)

Alors qu’on l’attendait sur scène pour 21h30, Cindy Lee a finalement fait son apparition quelques minutes à l’avance – à 21h22 très exactement –portant une scintillante robe à paillettes dorées, un boléro en fourrure blanche et une volumineuse perruque au carré évoquant les années 1960. Un look parfaitement glamour taillé sur mesure pour le Rialto et son cachet outremontais.

En mode 100 % solo, avec des tabourets, un follow spot, une guitare électrique et une direct box pour unique compagnie, Cindy Lee nous a envoûtés à plusieurs moments de la soirée avec sa voix fantomatique pleine de réverbération et ses mélodies vintage/lo-fi emplies d’une grâce aérienne. Plusieurs surprises étaient également au menu, dont deux nouveautés sans titre qui auraient très bien pu figurer parmi les 32 pièces de Diamond Jubilee. C’était intéressant de découvrir certains morceaux et de s’imprégner des atmosphères rêveuses des compositions de Cindy Lee, qui auraient toutefois peut-être gagné à être interprétées en compagnie d’autres musicien.nes en chair et en os plutôt que par une bande sonore contrôlée avec des pédales.

Les envolées de Patrick Flemel sur sa Gibson auront toutefois sauvé la mise, notamment pendant la très groovy Dracula, l’exclusive Lamb of God ou la parfaitement envoûtante If You Hear Me Crying (un des morceaux phares de Diamond Jubilee). Idem pour la présence magnétique et mystérieuse de Cindy Lee qui, en bonne diva, sait habilement habiter la scène pour attirer et maintenir l’attention de son public sans dire un seul mot.

Bref, la décision de laisser toute la place à Cindy Lee, sa guitare, ses bandes sonores et ses pédales se défend, puisqu’elle donne à la prestation un aspect plus minimaliste donnant l’impression d’être isolée dans un studio maison pour une jam session intimiste en compagnie de l’artiste (avec quelques retours de son y compris!)

Un envoûtement de court instant

Après 45 minutes de vol plané dans un univers rêveur ensorcelant et teinté de douce mélancolie, Cindy Lee nous a laissés tout en douceur avec de timides au revoir sur les dernières notes de I Don’t Want to Fall in Love Again. Et c’est sous les synthétiseurs lancinants de la vaporeuse Just For Loving You I Pay The Price que l’artiste a remis les pieds sur scène pour un rappel des plus expéditifs, qui s’est conclu sur une reprise très courte et plutôt oubliable de Burning Candle du musicien albertain Chad VanGaleen.

À la manière d’un grand rêve projeté par notre inconscient, le passage de Cindy Lee en sol montréalais aura été envoûtant et agréable, mais aussi lointain et inaccessible, comme si toutes les portes n’avaient pas été tout à fait refermées.  Une ou deux pièces de Diamond Jubilee comme Flesh and Blood, Lockstepp, Stone Faces ou Kingdom Come auraient été bienvenues pour clore les choses sur une note plus mémorable. Il y a tellement plus de morceaux riches et variés qui auraient pu être greffés à cette soirée. Ce sera pour une prochaine fois peut-être, alors que la suite de l’aventure Cindy Lee pourrait bien survenir plus tôt que tard.

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