Ấm au TNM | Une création imparfaite

La pétillante écrivaine Kim Thúy offre son premier texte dramatique «Ấm» sur la scène du Théâtre du Nouveau Monde. Suite à une commande de Lorraine Pintal, qui en signe la mise en scène, le spectacle suit une ligne dramaturgique logique pour la prolifique autrice ; il dépeint la fiction autobiographique d’une relation amoureuse entre une québécoise d’origine vietnamienne et un québécois canadien-français, entrelacés d’un enfant muet, tout comme le fils de Kim qui est autiste non-verbal. Malgré la magnificence de l’écriture de Kim Thúy et l’opulente scénographie, le résultat est inégal et manque de souffle pour faire honneur à ses mots.

Le sol brille plus qu’à l’habitude le long d’une passerelle blanche et les corps s’y reflètent comme un miroir : un bassin d’eau, surmonté de plateformes rappelant les pilotis des maisons vietnamiennes. Le décor s’impose et miroite d’inventives promesses. Mais celles-ci ne se réaliseront qu’à moitié. Bien que ce soit visuellement splendide, la relation entre les deux amoureux n’arrive pas à s’épanouir dans l’intime et demeure trop superficielle par rapport au texte. L’aménagement aurait pu être exploité davantage, la mise en scène de Lorraine Pintal demeurant assez statique. Certaines scènes avancent difficilement alors que d’autres coulent agréablement. Le jeu de Cynthia Wu-Maheux et Jean-Philippe Perras est ampoulé, comme déclamé. Les comédiens pourtant au sommet de leur forme n’arrivent pas à nous faire croire à cet amour profond entre deux êtres.

La présence du danseur Jimmy Trieu Phong Chung est poétique, apaisante et absolument signifiante, s’immisçant dans le couple et régissant la vie de sa mère, exactement comme les enfants à besoins particuliers. Ses gestes empruntés aux tocs de l’autisme sont incarnés et puissants, et les rares interactions avec les protagonistes, très poignantes.

L’équipe de création est passée à côté d’une belle opportunité de transcender le littéraire sur scène. On entendait la plume de Kim, sa manière de raconter l’horreur avec tant de résilience et de sourire. Sa manière de s’indigner contre les politiques anti-immigration avec tant de bienveillance et d’amour, sa manière de gérer les conflits avec la pudeur propre à ses origines. Il est à parier que l’autrice elle-même les aurait mieux livrer, avec plus de simplicité et que le public en aurait été plus ému. Il y a de beaux moments, ce n’est pas complètement beige, mais ça n’a pas l’effet escompté. Et on voulait tellement que ce soit parfait!

Au Théâtre du Nouveau monde de Montréal du 9 septembre au 8 octobre 2025  – supplémentaires les 7 et 8 octobre.

Ce spectacle sillonnera les villes du Québec dans le cadre des Sorties du TNM :

• 21 octobre 2025, Québec, Salle Albert-Rousseau
• 23 octobre 2025, Rimouski, Salle Desjardins-Telus
• 28 octobre 2025, Sherbrooke, Centre culturel UdeS | Salle Maurice O’Bready
• 4 novembre 2025, Terrebonne, Théâtre du vieux Terrebonne
• 6 novembre 2025, Granby, Le Palace
• 11 novembre 2025, Drummondville, Maison des arts Desjardins
• 14 et 15 novembre 2025, Gatineau, Salle Odyssée
• 21 novembre 2025, Laval, Salle André-Mathieu

Texte de Kim Thúy
Mise en scène Lorraine Pintal

Avec Jean-Philippe Perras, Jimmy Trieu Phong Chung et Cynthia Wu-Maheux

Assistance à la mise en scène et régie
Bethzaïda Thomas

Conseillère dramaturgique
Lorraine Pintal

Collaboration au texte
Yves Leduc

Décor et accessoires
Pierre-Étienne Locas

Costumes
Julie Charland

Éclairages
Martin Sirois

Musique
Michel Corriveau

Vidéo
Charles-Olivier Michaud

Chorégraphie
Jocelyne Montpetit

Maquillages
Jacques-Lee Pelletier