Critique album | Matthew Herbert – The End of Silence
Matthew Herbert n’est décidément pas à court d’idées! Après son projet One Pig qui explorait l’univers sonore propre à l’industrie porcine, il aborde maintenant le sujet de la guerre. En effet, sa dernière parution, The End of Silence est constituée presqu’en totalité du bruit d’une bombe lancée par l’armée libyenne en 2011. Le résultat est tout sauf banal.
Présenté sous forme de suite en trois parties, l’œuvre débute avec l’enregistrement original sans modifications, simplement pour présenter à l’auditeur la «matière brute» qui servira à construire le reste de l’album.
Plutôt calme, la première partie s’approche souvent de l’ambient et tisse ici et là de délicates mélodies et lignes de basses.
Herbert utilise les pauses de façon intelligente et ne craint pas les moments de quasi silence entre les sous-sections dans ce premier «mouvement». Il laisse néanmoins entrevoir les éclats de violence qui apparaissent plus tard dans l’album. L’approche reste la même que pour la majorité du corpus de Herbert : microsampling virtuose, découpage minutieux recherchant autant des qualités timbrales que mélodiques et bien sûr, un soupçon de noise.
Les deux autres parties de l’album se révèlent déjà plus mouvementées. Presque dansants, les rythmes qui parsèment ces sections rajoutent un côté vaguement pop à une musique relativement austère.
Car non, ce n’est pas un disque des plus accessibles ni des plus joyeux. Herbert explore ici les couleurs glauques de la guerre jusqu’à l’abstraction. Que ce soit dans les moments calmes et porteurs de désolation ou dans les passages agressifs, la musique n’est pas des plus faciles d’approche.
Cependant, il est important de souligner que nous n’avons pas à faire à une œuvre totalement hermétique. Quiconque écoute des styles moins commerciaux de musique électronique ou est le moindrement familier avec l’approche du musicien anglais ne sera pas dépaysé.
The End of Silence reste un album exigeant de l’auditeur un effort d’écoute et de réflexion. Sa structure et les limites qu’Herbert s’impose dans sa pratique peuvent rendre sa musique quelque peu sévère. Définitivement intéressante mais étant parfois victime de ses règles, elle peut sembler froide ou même ennuyeuse à certains. Nous ne croyons pas que ce soit le cas ici…
En somme, un album qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit de One Pig et Plat du Jour. Très certainement digne d’intérêt mais ne nous offrant pas l’occasion de découvrir des facettes très différentes de l’immense talent de Matthew Herbert. Par contre, dans un monde parfois tristement uniforme, il est essentiel de savoir que des individus comme Herbert pratiquent leur art avec intégrité et suivent leur voie, envers et contre tous.
- Artiste(s)
- Matthew Herbert
- Catégorie(s)
- Electro,
Vos commentaires