crédit photo: Pierre Langlois
Florist

Florist à la Sala Rossa | Belle musique n’égale pas toujours bon spectacle

Jeudi dernier, le 29 mai 2025, le groupe américain Florist était de passage à la Sala Rossa pour y présenter les chansons de Jellywish, son cinquième album en carrière paru en avril dernier. Si l’album est de loin l’un de mes favoris de cette année, le spectacle l’aura moins été. Retour, donc, sur une soirée pleine de contradictions.

Allegra Krieger

C’est la New-Yorkaise Allegra Krieger qui assure les premières parties de la présente tournée de Florist. La musicienne est seule sur scène avec sa guitare et un petit clavier pour jouer quelques chansons le temps d’une première partie un peu longue et passablement oubliable. Pas que les chansons soient nécessairement mauvaises en soi, mais la voix de la chanteuse peine parfois quelque peu à bien les appuyer et le manque d’arrangements plaira certainement aux fans de Joni Mitchell, mais offrira un important contraste avec ce qui suivra dans la soirée, venant de la part d’un groupe aux compositions subtiles et cérébrales. Le public semble bien avoir apprécié ceci étant dit.

Florist

Après une courte pause, Florist monte sur scène et entame directement avec Levitate, qui se trouve à également introduire l’album Jellywish. Les arrangements live y ajoute un certain groove moins intimiste que sur enregistrement, mais l’esthétique particulièrement bruitiste et exploratoire qui l’accompagne également donne un côté très intéressant à la chanson. Le procédé est bien pensé et aide à désamorcer le côté parfois très, voire trop pour la scène, introspectif et contemplatif des pièces de la leader et principale autrice Emily Sprague. Niveau mix sonore. il y a aussi du beau : la batterie est très sèche, presque « mutée » en bon français, ce qui aide à ne pas enterrer le reste de l’ensemble et à prendre trop de place, alors que la basse volontairement sautillante est très ronde et chaude. Un début de spectacle offrant une très belle introduction et qui donnera le ton à ce qui viendra par la suite, musicalement parlant.

Le groupe enchaîne avec une transition sans intervention parlée ni silence, ce que j’adore généralement. Les temps morts et moments de flottement entre deux chansons sont généralement ce qui nuit le plus à la qualité d’écoute chez le public : pas le temps d’applaudir, pas le temps de commencer à parler. Le pont se fait donc très bien avec Have Heaven. On se demande par contre pourquoi ne pas avoir gardé cette façon de faire plus couramment pendant le spectacle, et c’est là l’une des raisons qui aura créé une drôle d’énergie qui caractérisera le spectacle dans son ensemble.

On remarque rapidement un manque de structure dans ce qui nous est livré sur scène. Certains enchaînements sont magnifiques et bien pensés, d’autres assez étranges. Les interventions parlées seront aussi de moins en moins pertinentes à mesure que le spectacle avance. Plutôt que de nous parler directement des chansons afin de nous offrir un nouvel angle d’appréciation, le discours migrera parfois vers d’autres sujets, processus culminant entre les chansons This Was a Gift et Jellyfish avec une tirade que je ne comprends toujours pas quelques jours après : « I’m sensing some awkward things here right now. It’s gemini season I guess. I feel like Montréal, and French Canadians in particular, are very gemini. It’s weird. » Est-ce une critique? Devrait-on mal le prendre? Rien ne suivra sur le sujet, difficile de savoir.

Le spectacle sera également très court. 14 chansons uniquement, souvent courtes, et ce de la part d’un groupe qui a pourtant cinq albums et trois EPs à son actif. Encore un élément structurel qui soulèvera quelques interrogations de mon côté. Comme si le groupe ne voulait pas vraiment être là, ou faire cette tournée de manière plus générale. Considérons-nous d’ailleurs chanceux : le spectacle du lendemain à Boston n’aura duré que l’espace de 12 morceaux.

Après toutes ces critiques, reste tout de même que l’aspect purement musical est d’une rare qualité, nous venant de quatre musiciens de talent, conscients des autres, aventureux et à l’écoute constamment. Certaines chansons sont magnifiques, même plus que sur album. All the Same Light sera pour moi le meilleur moment du spectacle : la formule live lui donne une certaine puissance particulièrement intéressante et une énergie qui lui donne un sens nouveau. Même chose pour la très belle chanson The Fear of Losing This de l’excellent If Blue Could Be Hapiness de 2017. J’aurais écouté le tout couché dans un bean bag les yeux fermés avec un énorme plaisir. La finale sur Gloom Design fera également du bien, nous laissant au moins sur un bonne note pour conclure cet étrange spectacle aux énergies contradictoires.

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