Radiohead

Radiohead au Centre Bell | Une prestation époustouflante

Ce lundi soir, après deux années d’absence, Radiohead faisait son grand retour à Montréal dans le cadre de sa tournée A Moon Shaped Pool. Dans un Centre Bell complet, le groupe britannique aura offert plus de deux heures d’émotions fortes après une première partie réussie de Junun.


 

Il y a de ces moments où le temps s’arrête, où les minutes ne sont plus comptées. Le groupe de rock mené par Thom Yorke en a d’ailleurs les capacités. De retour à son habitude sur scène, Creep n’aura pas été jouée ce qui n’altéra en rien une liste de chansons majuscule qui représente seulement une fraction de la grandeur de leur répertoire. De cette soirée, il y aura forcément eu des déçus par les titres sélectionnées mais la construction du set était réjouissante avec des pièces issues de presque la totalité de leurs albums studio.

 

Sursauts et évasions

Le temps passé avec Radiohead fait parfois sursauter, fait parfois voyager. Les quelques 14 700 spectateurs du Centre Bell pourront le témoigner, eux qui ont probablement vécu une rêverie constante comme bien souvent en compagnie du groupe britannique. Cette évasion commence d’ailleurs par le titre Daydreaming, une ouverture à la hauteur des attentes. Une douce introduction de piano suivie de cette voix frêle mais néanmoins pleine d’émotion de Thom Yorke plonge le public dans un univers de pénombres grisâtres qui seront vites surplombées par un immense écran ovale accompagné de polygones rouges et de faisceaux lumineux blancs qui transperceront l’immensité de l’arène.

Puis l’énergie monte d’un cran avec Ful Stop. Au détour de lueurs bleutées, le batteur Phil Selway est secondé par Clive Deamer (Portishead), ce percussionniste de l’ombre qui offre un coup de baguette supplémentaire en tournée depuis 2012. On s’aventure vite dans un son rock angoissant comme dans la suivante 2 + 2 = 5 avec ses harmonies vocales mystiques complétées par le guitariste Ed O’Brian.

Thom et sa bande parfaitement calibrés

Surviendra quelques minutes plus tard un calme ambiant qui témoigne des changements de rythmes, de couleurs et d’harmonies qui font la marque du groupe britannique. Sous des teintes douces et orangées, les envolées vocales d’un Thom Yorke passé au piano résonne sur All I Need et font de ce moment un instant privilégié. L’interlude aux claviers se poursuivra vers la subtile Videotape, ovationnée à sa juste valeur, avant que surviennent les douces notes connues de No Surprises émanant d’un Jonny Greenwood reconverti en xylophoniste. Le public est conquis et même si Thom Yorke ne s’époumone pas avec de grands discours, il remerciera très souvent les spectateurs venus en nombre… et parfois même en français.

Après une heure de spectacle, Radiohead est dans son élément tout comme son public. La montée progressive de l’intensité musicale se manifeste dès Bloom, titre sublimé par un rythme coordonné entre Selway, Deamer et Jonny Greenwood qui se dédie aux caisses claires. Puis c’est la basse de son frère Colin sur la très électro-rock Everything In Its Right Place qui fera trembler les corps avant que Exit Music (For A Film) offre un moment solennel avec un Yorke possédé, seul à la guitare acoustique, qui démontrera ses capacités vocales exceptionnelles. Il sera rejoint progressivement par les autres membres du groupe pour terminer par Myxomatosis ou encore Nude, dont l’instant est pur et en parfaite communion avec le public. La voix du leader de Radiohead a quelque chose de magique, définitivement.

 

Ovation et double rappel

Clap de fin avant qu’un rappel bruyant se fasse entendre, obligeant sans trop de surprise les musiciens à revenir pour cinq titres. On les retiendra évidemment tous, que ce soit House Of Cards avec cette marée de lumières provenant du public, l’expérimentale Idioteque ou encore The Tourist et sa boule géante affichée sur l’écran ovale. Radiohead reviendra enfin une seconde fois sur scène pour interpréter trois dernières chansons dans une finale sensationnelle.

Tout en humilité, l’entame de ce dessert se fait par la touchante Give Up The Ghost avant que plus tard Karma Police conclue le concert en apothéose avec un public motivé reprenant à plein poumons « For a minute there / I lost myself, I lost myself ». Une minute perdue est chantée, mais les cent-trente autres ne l’auront pas été pour les spectateurs montréalais.

 

Junun, une première partie réussie

La faute à des travaux sur la rue hors de l’enceinte et une gestion de file douteuse, le public n’avait pas totalement investi les gradins quand Junun s’est installé sur scène. Projet parallèle de Jonny Greenwood enregistré sur disque en 2015, ce collectif tient de la rencontre entre lui, le guitariste israélien Shye Ben Tzur et de l’ensemble indien Rahasthan Express tout habillé de blanc. Survient chez eux une émulsion particulière où les influences de chacun s’entremêlent joignant dans une orchestration surprenante des riffs rock avec de la musique traditionnelle indienne basée sur des percussions saisissantes et des chants transcendantaux. Une belle surprise, à n’en pas douter.

 

Liste des chansons

Radiohead Setlist Centre Bell, Montreal, QC, Canada 2018, A Moon Shaped Pool

 

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